Immense film de Kubrick, qui trouve
ici une harmonie à la fois dans la forme et dans le fond : à la lenteur du
rythme, à la lenteur des déplacements minutieux des vaisseaux répond la
lenteur du temps et l'espace infini. Kubrick révolutionne les effets spéciaux
et fait paraître des films contemporains ou même postérieurs comme datés sur ce
plan là, par exemple Le Mystère Andromède, brusquement dépassé.
L'ampleur du propos a été largement
commentée : le parallélépipède mystérieux vient, comme une borne, à la fois
inspirer l'humain (ou le pré-humain dans la première séquence) et montrer sa
petitesse.
C'est, en outre, un magnifique
prolongement de la réflexion de Theilhard de Chardin :
« Mais pourquoi donc,
dira-t-on, ce labeur ? Pourquoi ressentir autant de plaisir à mieux voir la
physionomie de cette boule énorme et ennuyeuse dont la surface nous emprisonne
? Qu'est-ce qui courbe donc invinciblement l'homme sur la tâche inutile de
comprendre la Terre ? La réponse est facile… Obstinément,
parce qu'un secret instinct le pousse et qu'une longue expérience l'a instruit,
l'homme croit qu'aucune parcelle de vérité n'est stérile, mais que la moindre
découverte scientifique est un élément irremplaçable, sans lequel ne s'achèvera
pas l'éveil entier de sa conscience, c'est-à-dire la plénitude de son âme. La
terre était liée à lui comme un monstrueux problème. Il s'est jeté sur elle.
Qui oserait dire que de ce contact avec l'inconnu il n'est pas sorti grandi
? »
Kubrick, en cinéaste, n'a pas besoin
de paroles ou d’explication, tout est contenu dans le pouvoir
de l'image.
Bien entendu, plus encore que la rigueur de
construction narrative, que l'application à chaque plan, que le sens de l'ellipse (extraordinaire passage de l'os au vaisseau spatial), que le combat de l'homme contre la machine (avec une éblouissante séquence de
mise à mort de l'ordinateur, où le spationaute est comme plongé au cœur même de
l'organisme mécanique), c'est la puissance de l'image de Kubrick qui fascine.
Sans un mot, confiant à Ligeti l'aspect étrange, mystérieux et rayonnant du
monolithe, il explore le questionnement de l'homme. Il passe ainsi, séquence après séquence, du singe à l'homme, puis de l’homme au surhomme (reprenant ainsi la progression nietzschéenne). Et l'on suit l'apparition de la technologie, l'affrontement de l'homme et de la technologie et enfin le dépassement de cette technologie.
Toute la dernière séquence est éblouissante : c'est uniquement par l'étrangeté de l'image, du montage, du décor, que Kubrick interpelle et renvoie l'homme au-delà de ses propres limites. C'est par l'image qu'il fait s'élever les interrogations de son film, c'est par l'image qu'il s'exprime le mieux. C'est ainsi que Kubrick, formidable créateur d’images, est éblouissant.
Toute la dernière séquence est éblouissante : c'est uniquement par l'étrangeté de l'image, du montage, du décor, que Kubrick interpelle et renvoie l'homme au-delà de ses propres limites. C'est par l'image qu'il fait s'élever les interrogations de son film, c'est par l'image qu'il s'exprime le mieux. C'est ainsi que Kubrick, formidable créateur d’images, est éblouissant.
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