
Intéressant film construit en deux
parties bien distinctes qui, même si elles semblent se suivre, apparaissent
progressivement très différentes l’une de l’autre. Cette rupture change
complètement la trajectoire du film, qui était jusque-là basée, de façon assez
classique, sur un hold-up, même s’il y avait déjà l’originalité d’être commis
par des personnages qui ne sont pas des voleurs par essence. Cette
particularité prendra bien sûr toute sa dimension dans la seconde partie, où le
film bifurque vers une esthétique très différente, avec une plongée dans la
nature, dans les rencontres, dans cet ailleurs, qui constitue en fait le
hors-champ de la première partie. Après la ville, la banque, les cloisons dures
qui bornent l’espace et les rapports humains délétères, vient le temps de
l’ouverture, de l’espace, de la douceur calme. Rodrigo Moreno joue de cet
antagonisme, montre les aspirations de Morán, puis de Román (son anagramme), le
laisse errer, découvrir la saveur de la liberté qu’il a cherché à acquérir.
De façon pertinente, Moreno montre aussi
les conséquences du hold-up avec le gardien qui est licencié. L’individualisme
de l’acte de Morán est ainsi montré, là aussi comme une espèce de contre-champ
idéologique de son hold-up puisque son action libératrice et juste – selon son
point de vue (ne voler que le nécessaire pour vivre sans travailler) – provoque
des licenciements. Moreno n’oublie donc pas ce terrible aspect des choses, qui,
par effet domino, fait partie du prix à payer pour la liberté : si le
hold-up et la prison sont une violence acceptée par Morán, son beau projet violente
socialement quelqu’un qui n’a rien demandé.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire