samedi 18 octobre 2025

Fanfare d'amour (R. Pottier, 1935)





Si cette amusante comédie a un peu vieilli, elle est néanmoins fondamentale pour tout cinéphile : elle n’est rien moins que le film qui a inspiré Certains l’aiment chaud qui en est un remake certes virtuose et très au-dessus de l’original, mais un remake quand même. C'est  d'ailleurs un élément regrettable pour le film de Richard Pottier : il est bien difficile de le regarder avec un oeil neuf en oubliant le film de Billy Wilder.
Ce film matrice, donc, s’il n’est pas exempt de défauts, est passionnant à regarder : il démarre doucement mais il propose ensuite une belle envolée à coup de déguisements, de jeux et de quiproquos amoureux très vaudevillesques.
Il est bien sûr captivant de regarder ce que le film de Wilder conserve et enlève à partir de ce matériau. Au-delà des ajustements scénaristiques (en particulier l’apparition, dans le remake, du danger de la pègre qui motive le travestissement d’urgence et que l’on retrouve en fin de film) et si Billy Wilder conserve bien entendu le travestissement au cœur du jeu comique, le film de Richard Pottier s’amuse à transformer sans cesse Jean et Pierre, qui apparaissent tantôt déguisés en femmes et tantôt en séducteurs se disputant la même femme. Plus le film avance et plus ils mettent et enlèvent leurs déguisements. Ce jeu très drôle sera simplifié chez Wilder puisque l’on sait que seul Tony Curtis cherchera à séduire Marilyn Monroe (prenant au passage la voix de Cary Grant) quand Jack Lemmon, lui, conserve perruque et voix féminine de bout en bout (sauf pour la réplique finale !). On imagine les hésitations qui ont dû tourner en boucle dans la tête de Diamond et Wilder – les scénaristes de Certains l’aiment chaud – avant de décider d’abandonner ce jeu comique propice à de nombreuses situations très drôles. Ils ont alors imaginé un autre jeu très drôle lui aussi : pendant que Tony Curtis draguait Marilyn, Jack Lemmon était dragué de son côté par un vieillard millionnaire (donnant ainsi une importance beaucoup plus grande à un gag qui existait déjà mais en mode mineur).
Ce n’est pas la première fois qu’un remake ose ainsi enlever une pièce clef d’un film pour prendre la même idée par un autre bout (1) et l’on admire cette prise de risque (il était facile pour Wilder de s’en tenir au triangle amoureux doublé d’un travestissement) qui, finalement, démultiplie encore l’efficacité du scénario d’origine.
Reste la toute fin : un peu rapide et survolée chez Pottier, parfaite et légendaire chez Wilder.




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(1) : On pense à La Mouche qui fait des modifications considérables par rapport à La Mouche noire : refusant une transformation radicale qui offrait une sidération et une chute marquante, Cronenberg opte pour un changement progressif de son personnage, changement qui devient peu à peu le sujet du film.


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