
Jane Campion,
dès ce premier film, installe son esthétique particulière. Elle filme un
personnage un peu border-line, avec un désordre sans cesse mis en avant à
l’image : désordre dans la vie de Kay et dans ses névroses, irruption
folle de Sweetie, la sœur un peu folle et ingérable, qui vient rajouter ses
traumatismes, désordre dans le cadre et le montage, dans la maison de Kay, dans
tout ce qui constitue sa vie. Mais Campion s’attache à ses personnages et elle
les peint avec attention et tendresse, sans condescendance ni distance. Et elle
filme avec tranquillité, confiante dans son rythme, sans chercher à raconter de
façon linéaire et stable : le désordre des personnages emplissant le cadre
et débordant jusqu’à déstabiliser légèrement la narration.
On retrouvera le
même cinéma et la même manière de filmer – en plus abouti peut-être – dans ses
films suivants, si souvent emplis de ces personnages un peu en marge, à leur
façon, de Un ange à ma table à The Power of the dog en passant par La Leçon de piano, Portrait de femme, Holy Smoke ou Bright Star : ce sont des
personnages qui font un pas de côté avec le monde, qui flirtent avec la marge,
avec la normalité du monde qui les entoure, par complexes, traumatismes,
intérêts particuliers, sensibilités, envies de liberté ou de poésie.
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