lundi 26 février 2024

Gens de Dublin (The Dead de J. Huston, 1987)

 



Éblouissant film de John Huston qui, à quatre-vingt un ans, réalise un film mélancolique et calme, comme un dernier regard sur le monde. Incroyable de maîtrise, de ressenti, d’humeur douce et chaude, The Dead surprend d’autant plus que ses derniers films (L’Honneur des Prizzi notamment) n’étaient guère convaincants.
Avec une maîtrise totale, il compose, sur un rythme calme, une soirée de Nouvel an toute en retenue, dans un monde guindé mais chaleureux, un peu perturbé par le frère alcoolique, dans cette société bourgeoise, où les apparences comptent pour tout et il nous semble être invités parmi les gens de la famille.
Volontiers élégiaque, entrecoupé de séquences magistrales et émouvantes (le chant dans la cage d’escalier), Huston, avec ce film testamentaire merveilleux, parvient à faire oublier les films mineurs qui émaillent ses années de travail et donne presque une humeur différente à toute son œuvre.


vendredi 23 février 2024

Lune froide (P. Bouchitey, 1991)





Étonnant film de Patrick Bouchitey qui capte parfaitement la solitude de Simon et Dédé (Jean-François Stévenin et Bouchitey lui-même, parfaits), deux paumés à la fois marginaux et brisés. Leurs errances nocturnes, l’alcool, la mélancolie entrecoupée d’exaltation, les moments où tout fout le camp, tout cela éclate sous la nuit claire du film. Et la seconde partie, construite autour de la séquence à la fois folle et provocatrice – mais filmée sobrement et presque avec douceur – du cadavre volé et de la nécrophilie ajoute une touche de conte fantastique mais aussi de pure folie à ce film iconoclaste et très réussi.



lundi 19 février 2024

Micmacs à tire-larigot (J.- P. Jeunet, 2009)





Cette comédie de Jean-Pierre Jeunet recueillera sans doute des avis tranchés : il faut dire que, film après film, celui-ci confirme son style et s’y cantonne. On a donc droit ici à un montage vif, à des personnages burlesques et hauts en couleur, à un récit qui ne s’embarrasse pas de fioritures et qui avance, le tout dans une ambiance qui fait la part belle au rétro et aux belles années du passé, baignant dans une lumière sépia qui envahit l’écran. L’ambiance steampunk de La Cité des enfants perdus laisse ici place à une décoration très typée récupération, entre brocante et ferraillerie.
On trouvera néanmoins le propos bien vide. Il n’y a pas une once de crédibilité dans cette histoire qui certes ne se prend pas au sérieux, mais qui dénonce en passant l’industrie des armements, de manière un peu facile et très vite moralisante, c’est un peu dommage (les méchants, même dans les comédies, sont toujours des grands patrons, d'autant plus qu'ici ils vendent des obus).
Mais l’on préfère ce ton léger aux variations de ton mal senties du film précédent de Jeunet, Un long dimanche de fiançailles, où les deux registres dramatiques et comiques ne se mariaient pas du tout. Jeunet ne sait pas filmer sérieusement : il a bien raison de rester dans la comédie.

 


samedi 17 février 2024

En eaux très troubles (The Meg 2: The Trench de B. Wheatley, 2023)

 



Affligeant film industriel qui regroupe tout ce que le cinéma fait de pire en matière de films d’action. Les délires scénaristiques et les erreurs scientifiques viennent vite au second plan devant la bêtise des situations et des personnages et devant la bouillie d’images déversée sans mesure ni raison.
C’est un prototype de ce que l’industrie, sans autre ambition que de gagner de l’argent, peut produire. Le succès, bien sûr est au rendez-vous : l’objet est trop bien calibré pour convaincre le public pour que celui-ci se dérobe.
En amoureux du cinéma, si l’on sait bien les tenants et aboutissants financiers de toute production par les studios, on ne peut qu’être navré par cette caricature hollywoodienne.

 



jeudi 15 février 2024

Coast Guards (The Guardian de A. Davis, 2006)





Film d’action sans grand intérêt d'Andrew Davis. Empli de bons sentiments qui viennent se mélanger avec des séquences d’action convenues, on a bien du mal à être surpris ou happé par le film qui déroule son scénario tranquillement et sans se poser de questions. La fin, en particulier, qui impose coûte que coûte une forme de happy-end, est une surenchère fatigante de sucre qui achève de faire sombrer le film dans le mièvre.

 




mardi 13 février 2024

L'Election (Hak seh wui de J. To, 2005)

 



Intéressant film de Johnnie To qui nous entraîne dans les méandres des chefs de triades et de leurs successions. Le film est rythmé (quand bien même il y a moins d’action que ce que le genre admet le plus souvent), les personnages, sans exercer cette fascination vers laquelle entraîne souvent les films de mafia, sont crédibles et les traditions menacent de voler en éclat sous les ambitions.



vendredi 9 février 2024

Sur les ailes de la danse (Swing Time de G. Stevens, 1936)





Premier succès pour George Stevens, la comédie musicale Swing Time confirme le fameux duo Fred Astaire et Ginger Rogers en même temps qu’elle lance le réalisateur vers d’autres ambitions (avec à nouveau Fred Astaire dans les années qui suivent, avant de changer complètement de registre au cours des années 40 puis 50).
Le film met en scène de façon assez conventionnelle de nombreux morceaux musicaux aux registres incontournables (humour, hommage, émotion), développant  avec application les séquences attendues d’un genre alors en plein succès.

 



mercredi 7 février 2024

Plus fort que le diable (Beat the Devil de J. Huston, 1953)





Plus fort que le diable adopte rapidement un faux-rythme qu’il n’abandonne jamais, autour de cette histoire d’un groupe à demi-escrocs ou à demi-sincère, qui hésitent entre errance et oisiveté. Mais ce faux-rythme captive peu et laisse le spectateur dans un entre-deux permanent peu convaincant. C’est bien dommage, cette histoire d’escrocs à la distribution alléchante (Humphrey Bogart en tête) laissait espérer meilleur sort.
On est d’autant plus déçu quand on sait combien John Huston sait maîtriser les faux-rythmes ou les récits relâchés et qu’il aime, en définitive, lorsqu’il y a peu à raconter et que tout est dans une atmosphère ou dans une humeur particulière (comme dans Fat City ou Gens de Dublin). Mais ici le fil semble perdu et l’on y croit jamais trop, un peu comme ces personnages qui attendent, eux aussi, sans jamais trop y croire.



lundi 5 février 2024

Asphalte (D. Amar, 1981)

 



Film choral assez étonnant, où, sur un fil rouge tout trouvé (la route lors d’un départ en vacances), Denis Amar entremêle de multiples situations, qui sont aussi l'occasion de multiples portraits. Sans chercher à faire se rencontrer toutes ces trajectoires qui s’entrecroisent, Amar montre les accidents, les rencontres, les pauses, les tragédies, avec toujours, au milieu, le ruban de la route, coupable ou complice, qui rattache ou déchire. Autour de la route, deux lieux surgissent violemment et lui font comme un écho : la casse et l’hôpital, où les destins (de la voiture ou des humains) conduisent.
Et le film distille peu à peu un certain malaise, autant par les personnages parfois décalés, les situations, les drames sans concession qui viennent briser l’humeur des vacances ou par d’étranges touches de fantastique égrenées ici et là.