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mercredi 11 juin 2025

Un condé (Y. Boisset, 1970)

 



Très intéressant polar français qui démarre sur des bases assez classiques mais dérive rapidement avec l’entrée en scène de Favenin, flic qui évolue comme un électron libre et cherche à venger son ami.
Michel Bouquet, le regard fermé et la bouche pincé, est impeccable dans cet inspecteur impitoyable et que rien n’arrêtera. La manière dont il tue le meurtrier de son ami est remarquable : « tirer sur homme désarmer ça s’appelle un assassinat » se défend Michel Constantin ; « alors ce sera un assassinat » répond sèchement Michel Bouquet avant de vider son chargeur.
Si Boisset, au travers de ce personnage sans limite, reprend les gros pinceaux souvent malhabiles avec lesquels il peint habituellement les situations qu’il dénonce, ici le personnage dépasse le propos politique (la dénonciation des méthodes policières, qui a valu au film des interdictions) et détonne au milieu d’un cadre par ailleurs très conventionnel. De sorte que le sujet du film n’est plus une quelconque dénonciation mais bien plus le personnage en lui-même, ce qu’il est, ce qu’il fait.
Cet inspecteur Favenin apparaît alors comme une sorte d’inspecteur Harry avant l’heure, en version française et jusqu’au-boutiste. Loin de l’imagerie cartoonesque de super-héros de Dirty Harry et de sa dégaine légendaire avec costume, lunettes de soleil et flingue gigantesque (l’allure de Michel Bouquet engoncé dans son imperméable n’étant pas précisément celle de l’ami Eastwood), il y a pourtant de nombreux gènes communs entre les deux flics : rejetés par leur hiérarchie et rejetant eux-mêmes le système, ils évoluent en marge des manières de faire, avec une version très personnelle de la justice, dégainant à tout va et, finalement, l’un jettera son étoile quand l’autre démissionnera. On s’amuse de voir que le flic de Boisset va plus loin que celui de Don Siegel en franchissant largement et sans coup férir la ligne rouge. Et, même, dans le deuxième opus de l’inspecteur Harry (Magnum Force), celui-cicombat de jeunes flics allant plus loin encore que Dirty Harry : ils appliquent en fait les méthodes radicales de Favenin.

 

samedi 30 mars 2024

Le Prix du danger (Y. Boisset, 1983)

 



Anticipant les délires de la téléréalité et poussant, comme il se doit, le curseur un cran plus loin, Yves Boisset tire à boulets rouges sur le spectacle télévisuel dans tout ce qu’il a de cynique et aussi sur les foules avides qui cautionnent ce sinistre show.
Si ce n’est la destinée meurtrière du jeu on retrouve des équivalents récents qui rendent le jeu télévisé du film tout à fait crédible.
Mais il est bien dommage que Boisset avance toujours avec de gros sabots : ses personnages sont très caricaturaux et la dénonciation, très lourde, quand bien même elle peut être assez juste, a peu de portée.
L’idée force du Prix du danger évoque de nombreux films, notamment américains, en particulier Network qui montrait déjà toute la dimension outrancière et jusqu’au-boutiste du spectacle télévisuel ou encore Rollerball, dont le jeu destiné à captiver les foules dérive jusqu’au sang ou même La Course à la mort de l’an 2000, qui joue aussi de l’avidité du public pour le sang au travers de puissants relais médiatiques.

 



mercredi 15 novembre 2023

Espion lève-toi (Y. Boisset, 1982)

 



Un peu comme dans Cadavres exquis, le personnage campé par Lino Ventura – qui n’est plus un inspecteur enquêtant mais un espion dormant réveillé – se fait manipuler tous azimuts, sans savoir à quel saint se vouer. Et c’est là une qualité du film : si, d’ordinaire, Yves Boisset peint presque toujours à gros traits les situations qu’il évoque, il parvient ici à maintenir flous la plupart des protagonistes, de sorte que l’on ne sait pas, au milieu de tous ces espions, qui trahit et qui ne trahit pas. Le film a une sécheresse bienvenue (que n’a pas, bien souvent, Boisset) qui se marie bien avec cette incertitude et avec le jeu de ses acteurs.
Il faut dire que l’autre atout du film est la confrontation de Lino Ventura avec Michel Piccoli. Ne serait-ce que pour ce plaisir de les voir confronter leurs jeux et leurs puissantes personnalités, il faut voir cet Espion lève-toi méconnu.

 



vendredi 14 décembre 2018

Le Juge Fayard dit "le sheriff" (Y. Boisset, 1977)




Comme pour d’autres de ses films (par exemple Dupont Lajoie), Yves Boisset s’inspire d’un fait divers réel (l’assassinat d’un juge deux ans auparavant, peut-être – sans doute – par ceux sur lesquels il enquêtait) pour livrer un film politique volontaire mais sans grande finesse. Il montre ici l’étendue de la corruption dans une ville (Saint-Etienne) et tente de comprendre les liens entre petites frappes, grand banditisme et hommes politiques hauts placés.
Le propos est dur puisque la gangrène semble très avancée dans la ville et que le juge a beau se remuer, chaque pas en avant lui fait entrevoir davantage l’énormité de l’organisation à laquelle il fait face et qui, bientôt, le dépasse complètement.
La personnalité du juge se veut assez fouillée avec, en particulier, un regard sur sa vie personnelle et l’impact de son travail sur cette vie privée, qu’il tente de faire avancer bon an mal an. La qualité du jeu de Dewaere permet de relier la dureté du juge lors de ses investigations avec ces atermoiements intimes ou des moments d’exaspération maladroite.
Si le film est assez pessimiste (malgré la toute dernière scène qui est comme une volonté d’y croire, malgré tout, de la part du réalisateur), on regrette que le film ne soit pas plus nuancé et que le portrait de la ville corrompue ne soit pas peint avec plus de finesse (les méchants sont très méchants, les menaces ne constituent pas des menaces insidieuses que le juge ressentirait mais ce sont des menaces directes, énoncées frontalement, etc.).



A noter aussi, derrière Patrick Dewaere sur lequel le film est centré (comme pour beaucoup de ses films), le très bon second rôle de Philippe Léotard, en flic intègre qui soutient comme il peut le juge.

lundi 22 octobre 2018

Dupont Lajoie (Y. Boisset, 1975)




Dans Dupont Lajoie, Yves Boisset, avec ses gros sabots, cherche à dénoncer la médiocrité, la bêtise, la lâcheté et le racisme ordinaires. S’il s’inspire de faits réels (des ratonnades anti-algériennes en 1973 dans le sud de la France), il trace ainsi à gros traits quelques portraits, qui sont en fait autant de caricatures. Le film s’en remet donc à quelques personnages (qui emprisonnent complètement les acteurs, par exemple l’ancien d’Algérie, joué par Victor Lanoux) autour d’un propos très simpliste.
C’est à partir du viol et du meurtre de la petite Colin que le film ne s’embarrasse plus guère d’une quelconque finesse (avant non plus, en réalité, mais il s’agissait plus d’une description sociale que d’une succession d'événements) : sur fond d’accusation raciste, il y aura vengeance, re-meurtre, revirement du policier, blanchiment de la bande, etc.
C’est dommage que ce type de film, très politique et militant, passe à côté de son sujet (la France, le travailleur immigré, le racisme), en se bornant à dénoncer mais tout en restant à la surface des choses, sans chercher à les comprendre.



On se dit aussi que Boisset aurait pu s'inspirer du cinéma italien (au travers de films comme Les Monstres ou Au nom du peuple italien par exemple), qui a su faire une critique au vitriol de l’Italie contemporaine, mais une critique fine, complexe, qui n’hésite pas à fouiller, gratter et scruter jusqu’au cœur de la société. Tout ce que ne fait pas le film de Boisset.