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vendredi 13 septembre 2024

Whiplash (D. Chazelle, 2014)

 



Dans son deuxième long métrage, Damien Chazelle nous emmène du côté off de la scène, dans les méandres d’une école de jazz réputée, lors des répétitions et de l’apprentissage d’Andrew, jeune batteur qui veut percer. Si Damien Chazelle cherche à capter quelque chose de la virtuosité des artistes il passe pourtant, nous semble-t-il, à côté de son sujet.
En effet Whiplash, essentiellement didactique, illustre les sacrifices demandés ou attendus pour parvenir à réaliser un rêve. Mais le film souffre de n’être qu’une illustration : il ne cherche pas à émouvoir musicalement et l’on voit Andrew dans ses efforts, ses échecs et ses réussites, ses espoirs et ses déceptions, mais on ne le voit pas dans une dimension artistique. Il n’y a pas d’émotion dans ce qu’il produit. Le spectateur n’est pas non plus le public que le film refuse obstinément au jeune batteur : seul Terence Fletcher, l’intransigeant chef d’orchestre, est son juge.
De sorte que le sous-entendu du film est tout de même surprenant : il confine l’aboutissement du musicien à la virtuosité technique. Comme si Charly Parker – dont il est souvent question dans le film – n’était qu’un virtuose. Non bien sûr, loin s’en faut, il était bien davantage : il possédait un génie créatif, tout ce qui ne s’apprend pas, tout ce qu’avaient, en réalité, les grands musiciens de jazz dont nous parle le film. Mais il n’y a rien de tout cela ici : mesurée par le terrible Fletcher, seule la capacité du batteur à tenir un rythme complexe ou très rapide sera décisive. Certes le bebop se voulait une apothéose technique (a contrario, justement, du cool jazz contre lequel il s'élevait) mais le musicien, réduit dans Whiplash à une unique dimension technique, apparaît comme un simple artisan performant mais non pas comme un artiste.
Et l’on reste circonspect devant ce Fletcher jusqu’au-boutiste qui a tout du sergent Hartmann (Full Metal Jacket est clairement cité). Il exige la perfection technique et reste seul maître du choix (encore une fois exit ici le public, ce qui est curieux concernant le jazz).
Et le film, donc, concentré sur la quête purement technique de son héros, oublie lui aussi la dimension émotionnelle. Ne saisissant pas le médium cinéma pour filmer la musique en train de se faire – c’est-à-dire montrer l’empreinte du génie créatif et l’émotion musicale – le film ne dépasse pas, émotionnellement, les déboires psychologiques de son personnage. La musique est à peu près nulle part émotionnellement.

On mesurera l’écart avec des films comme Amadeus ou Tous les matins du monde qui, dans des styles et avec des ambitions très différentes, sont emplis de musique,  avec All That Jazz (pour rester dans les coulisses d’un spectacle qui se monte), avec Bird (plusieurs fois cité, qui cherche à capter quelque chose de la musique de Charly Parker) ou encore, pour montrer combien le cinéma peut se saisir d’un art et en faire un véritable objet cinématographique, avec Les Chaussons rouges de Powell.

 


samedi 13 mai 2023

Babylon (D. Chazelle, 2023)





Derrière le rythme qui se veut frénétique et cherche à refléter la frénésie d’Hollywood, Babylon déçoit quelque peu.
Après une première séquence orgiaque (s’appuyant sur le scandale bien connu de Fatty Arbuckle), cette ambitieuse fresque qui se veut vive et rythmée peine pourtant à captiver. Pour ambitieux qu’il puisse être, le film est empli de séquences qui l’alourdissent, le rendant inutilement long et mal équilibré. De sorte que, peu à peu, une fois que l’on a compris où voulait en venir Damien Chazelle, l’ennui nous prend et le film fait progressivement subir ses plus de trois heures.

Il est intéressant de voir que Babylon évoque Chantons sous la pluie à la fois par le thème (le passage du muet au parlant notamment) mais aussi en étant cité directement en fin de film (il redonne le sourire à Manny). Mais cette référence pèse terriblement lourd  et montre l’abîme qui sépare les deux films. En effet, pour ne prendre que cet exemple, les séquences montrant les difficultés de tournage des toutes premières scènes sonorisées sont bien loin d’égaler celles du glorieux aîné.

Il reste quelques moments réussis et notamment la fin pathétique de Jack Conrad, très bien filmée.





lundi 26 novembre 2018

First Man : Le Premier homme sur la Lune (D. Chazelle, 2018)




Intéressant film sur Neil Armstrong (et non sur le projet Apollo 11, la différence n’est pas anodine : le film n’est pas une fanfare à la gloire de la conquête de la Lune). First Man prend son temps, cherche à éviter le spectaculaire et s’autorise de longs moments de noir à l’écran. Il reflète très bien, en fait, la personnalité d’Armstrong (Ryan Gosling, toujours peu expressif et peu charismatique), homme calme, taiseux, peu vendeur dirait-on aujourd’hui (moins, par exemple que Buzz Aldrin), mais qui est une bonne image de l’ingénieur très compétent, froid, technique, efficace.
Armstrong semble devenir mutique avec la mort de sa fille qui le marque profondément, mais il est dommage que Chazelle en rajoute (avec notamment la ridicule séquence du petit bracelet jeté sur la Lune).
Mais First Man évite malgré tout de tomber dans la même ornière qu’Apollo 13 de R. Howard qui, sur un sujet très proche, livrait une partition sans âme, comme un docu-fiction appliqué mais sans émotion, programmé pour plaire au public américain. En se centrant sur un personnage – à la fois clef et atypique – Chazelle biaise et s’éloigne de l’académisme hollywoodien. Au moins est-ce là son projet, parce que le film ne propose pas non plus une esthétique originale ou très marquée. Mais c’est le ton posé et presque intimiste, alors que le sujet est spectaculaire, qui retient l’attention.



dimanche 26 novembre 2017

La La Land (D. Chazelle, 2016)




On a bien du mal à partager l’enthousiasme délirant qui a accueilli le film, qui s’apparente à une honnête comédie musicale, mais sans grande originalité ni surprise.
Le film lorgne un peu du côté de Chantons sous la pluie en jouant sur une mise en abîme du cinéma et en reprenant une situation similaire pour jouer la rencontre des deux (futurs) amoureux. L'histoire nous plonge (un peu) dans l’univers du jazz. Mais les numéros de danse sont très basiques (on est, pour le coup, bien loin des classiques du genre) et la mise en scène est d’une parfaite platitude.
Bien entendu le film cite bon nombre de comédies musicales, depuis les incontournables de Minelli jusqu’à ceux de Jacques Demy, mais c’est un lieu commun du genre de reprendre des images célèbres pour agrémenter le film.
Vivre ses rêves impose des sacrifices, finit par nous dire le film. Certes. Sans doute. Bien. Les grands fans du genre resteront sans doute un peu sur leur faim. Quant aux autres, ils risquent de trouver le temps un peu long…