
Dans la belle filmographie des deux frères, il s’agit là d’un des films les plus oubliables (aux côtés, sans doute, du médiocre Ladykillers).
Très décevant
film des frères Coen, qui s’appuient pourtant sur le très bon Tueurs de dames de Alexander Mackendrick.
Mais là où l’original parvenait à jouer sur la corde raide de la caricature –
mesurant les moments où il en faisait trop pour se recentrer aussitôt – ici
tout est exagéré, tout est démesuré, tout sonne faux. À commencer par Tom Hanks,
navrant et insupportable à cabotiner sans cesse, et que l’on a bien du mal à
comparer à l’immense Alec Guinness, vis
comica brillante du film d’origine. Ladykillers,
alors, reste invariablement pesant, sans surprise, lassant.
On se demande un
peu comment les frères Coen, capables, dans la comédie, d’être si alertes (Intolérable cruauté) et de brosser des portraits
avec talent (The Big Lebowski), ont pu
passer ainsi à côté de leur sujet.
Après un premier
film réussi en forme de polar noir (Sang
pour sang), Joël Coen change son fusil d’épaule et explore la
comédie : il se fait donc plaisir avec ce film amusant, porté par un duo
de personnages très bien campé par Nicholas Cage (qui reprend ici le même ton
de looser dépassé que dans Peggy Sue
s’est mariée) et Holly Hunter. Autour de ces deux-là, les multiples
personnages font très cartoons et c’est là la première apparition de ce
prototype de personnage, brossé à gros traits, faisant irruption dans le cadre
sans le moindre doute, et que l’on retrouvera si souvent dans la filmographie
des frères Coen : de Miller’s Crossing au Big Lebowski en
passant par Intolérable cruauté ou O’Brother, c’est tout une galerie de
portraits de personnages secondaires résolument burlesques qui emplissent les comédies
des frères Coen.
Mais le film,
peu à peu, abandonne le ton de comédie du début, qui avait une teinte de
tragique désespéré porté par le couple McDunnough pour s’enfoncer dans un
loufoque bien peu subtile. L’on regrette un peu cet équilibre du début qui
parvenait à garder une certaine tenue, avec un montage très rythmé, une
répétition de séquences très drôles, une voix off percutante, le tout formant
une accroche réussie. Le film, sans doute, pâtit trop de ce burlesque loufoque
qui dénature un peu la tentative désespérée du couple de construire une
famille.
Avec Miller’s Crossing, Joël Coen semble
hésiter entre le film de gangsters sérieux et la comédie. Autour du personnage de
Tom Reagan qui lui-même oscille entre le très sérieux (il vomit quand il comprend
qu’il va mourir) et le pastiche (ses échanges avec les flics qui font une
descente), les personnages de cartoons, pas sérieux pour un sou, abondent, de
Casper, le rital chef de bande, à Dan, le tueur très méchant. Dès lors le film
hésite un peu entre deux tons et Coen fera mieux, sans doute, en allant
franchement dans le film noir (Fargo
par exemple) ou franchement dans la comédie (The Big Lebowski). Ici le louvoiement, s’il n’empêche pas le
film d’être plaisant, l’empêche de vraiment nous toucher et l’on se contente de
suivre, à demi-amusé et à demi-compatissant, les petites combines de Tom qui
fricote à tout-va pour s’en sortir.
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La fine équipe au bowling (The Dude, Donny et Walter) |
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Jeff Lebowski fait ses courses... |
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William H. Macy, en petit commercial dépassé par les événements. |