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vendredi 22 novembre 2019

Stardust Memories (W. Allen, 1980)




Extraordinaire film de Woody Allen qui propose une réflexion sur son art et la façon qu’il a de s’articuler avec sa vie. Bien entendu le Huit et demi de Fellini n’est jamais très loin en toile de fond. Mais Woody Allen parvient à transposer l’univers de Fellini dans son propre univers, ce qui n’est pas rien, tant le réalisateur italien a une personnalité et un style puissants. Mais cela montre aussi l’univers si particulier de Woody Allen, qui n’a guère d’équivalent. Le film mélange alors, avec une inventivité et une liberté de tous les instants, des rêves, des films dans le film, des moments drôles, des scènes étranges. La première séquence du train est exceptionnelle et donne un raccourci saisissant de la condition humaine, tout en illustrant la peur et le doute qui saisissent le personnage de Sandy Bates (et bien évidemment Woody Allen lui-même).


Stardust Memories fascine par son jeu de tiroirs multiples (c’est un film dans un film dans un film), avec, comme liant supplémentaire entre ces différentes strates, Woody Allen lui-même, à la fois réalisateur et interprète du rôle du réalisateur. On a là un jeu de miroirs supplémentaire par rapport à Huit et demi puisque, quand bien même Mastroianni est l’alter ego bien connu de Fellini, l’effet n’est pas le même qu’avec Woody Allen qui est lui-même présent dans son film (avec par exemple un fan qui porte un tee-shirt de… Woody Allen ou de Sandy Bates, on ne saurait dire tant tout se confond).

Chez Fellini c’est la capacité créatrice qui était interrogée. Chez Woody Allen, en revanche, la question pose, au travers de ce réalisateur de films comiques qui ne veut plus faire de comique, c'est de savoir ce qui motive le mal-être de l’artiste : provient-il de son regard sur le monde (avec ces immenses images de l’Histoire qui s’imposent jusque dans son salon et devant lesquelles il monologue longuement) ou bien ce mal-être émane-t-il de ses propres tourments internes (nés de ses relations complexes, comme toujours, avec les femmes) ? Autrement dit, ce bouillonnement vient-il de l’extérieur ou du plus profond de soi ? Chez Allen, bien sûr, ce n’est pas le spectacle du monde qui l’assaille de doutes et de questions, mais bien plus son désarroi personnel et profond. Il exprime ainsi par l'image ce qu'il a pu dire par ailleurs : « Presque tout mon cinéma est autobiographique : exagéré mais vrai. Je ne suis pas social. Je ne reçois pas grand-chose du reste du monde. J’aimerais sortir de là, mais je ne peux pas. »





mercredi 18 septembre 2019

Woody et les robots (Sleeper de W. Allen, 1973)




Dans la droite ligne de ses premiers films (Prends l’oseille et tire-toi, Bananas et les sketchs de Tout ce que vous avez voulu savoir…), Woody Allen s’envole dans le futur et s’en donne à cœur joie : jouant sur le registre du gag et du burlesque parlant (les Marx Brothers sont sa source éternelle), il s’amuse à commenter les travers de son époque, avec, comme toujours, beaucoup d’imagination et de liberté.
C’est que Woody Allen, en bon gagman et dans cette veine comique où il n’a peur de rien, multiplie les idées, les situations et les réparties. Si on trouve déjà le fil rouge de ce qui sera le cœur de ses grands films ultérieurs (les complaintes du quadra juif intello new-yorkais), on s’amuse à ces délires de ses débuts, un peu foutraques et kitchs, mais vifs et d’une liberté cinématographique étonnante. Et c’est dans ce peu connu Sleeper (1) que Diane Keaton fait son apparition à ses côtés (2), commençant à mettre en place le contre-point féminin de l’éternel personnage masculin que campera bientôt Woody Allen.





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(1) : On notera la bêtise étonnante du titre français. Mais il montre combien Woody Allen acteur se confond – déjà – avec ses personnages.

(2) : Elle est déjà partenaire de Woody Allen dans Tombe les filles et tais-toi, qui lui aussi annonce, de façon encore forcée et caricaturale, les Annie Hall et autres Manhattan qui viendront quelques années plus tard, mais c’est alors Herbert Ross qui est à la réalisation.


vendredi 31 mars 2017

Zelig (W. Allen, 1983)




Exceptionnel film de Woody Allen, qui prend appui sur deux idées de génie, l’une purement scénaristique, l’autre formelle.
Cette idée d’un homme-caméléon qui s’identifie physiquement et intellectuellement aux personnes qui l’entourent, est somptueuse : Leonard Zelig est une image ultime du conformisme. Voulant plaire à autrui, Zelig, sans cesse, devient autrui. On a là une représentation, délicieusement exagérée, de qui veut plaire, de qui veut flatter autrui, de qui est toujours d’accord sur tout, de qui n’existe qu’au travers de la pensée dominante (avec le terrible confort du fascisme en ligne de mire).



Le corollaire est que Zelig, évidemment, laissé seul face à lui-même, n’existe guère. Il n’a pas de personnalité, pas d’opinion, pas de particularité. Il devient ce que sont les autres.
Et, brodant inlassablement sur ce thème, le film regorge d’idées (face au docteur, Zelig est insoignable puisqu’il se sent médecin ; soigné malgré tout, par un tour de passe-passe amusant, voilà Zelig trop bien soigné puisqu’il ne supporte plus la moindre contradiction, etc.).

La mise en œuvre est l’autre idée de génie : le film se présente sous la forme d’un faux-documentaire qui alterne images d’archives, fausses interviews et trucages avec une véracité incroyable et une imagination incessante et jubilatoire. Allen s’amuse à montrer une multitude d’images d’archives ou de références qu’il déforme et adapte (Forrest Gump n’apparaît alors que comme une pâle copie) et il incruste son étrange personnage multiformes à la place de Lindbergh dans sa parade, aux côtés de Chaplin ou de Scott Fitzgerald et va jusqu’à Rome déranger le pape ou, dans une image étonnante et très drôle, interrompre Hitler en plein discours. Les années 30 sont revues et corrigées avec foisonnement et truculence. Les trucages sont parfaits et les interviews factices des différents protagonistes plus âgés sont plus vraies que nature.

Le film, en plus d’une réflexion puissante sur le conformisme, propose une multitude de mises en abyme. Il peut se voir comme la volonté incessante du peuple juif à s’insérer ou encore comme les recherches cinématographiques d’un Woody Allen protéiforme qui s’essaye à de nombreuses formes cinématographiques. Le film, enfin, qui est en fait une déclaration d’amour (puisque Zelig sera sauvé par l’amour que lui porte son médecin), est aussi une mise en image de l’histoire d’amour entre Woody Allen et Mia Farrow.


dimanche 24 janvier 2016

Match Point (W. Allen, 2005)




Intéressant film de W. Allen, au ton bien éloigné de ses derniers films (d’ailleurs j’ai constaté que ce film était plutôt apprécié par ceux qui, par ailleurs, n’aiment pas plus que ça W. Allen). Il s’agit d’un drame sans la légèreté ou le second degré habituel du réalisateur.

L’intrigue est une variation basée sur le très bon film de Stevens Une place au soleil. W. Allen transpose l’intrigue, en inverse plusieurs éléments clefs mais l’idée générale reste bien présente (un homme écartelé entre deux femmes qui sont autant de positions sociales).
Allen n’insiste pas sur la société anglaise comme Stevens le fait sur la société américaine. Et il introduit dans son Match Point des réflexions sur la chance, en particulier au travers de la bague jetée à l’eau qui heurte le parapet et retombe à terre. Le spectateur y voit un élément clef (et il a raison) qui risque de perdre Chris (qui, à l’inverse d’Une place au soleil, est allé au bout de son idée de meurtre),  alors que cette bague retrouvée le disculpera définitivement. Dès lors, Chris, pendant de Georges dans le film de Stevens, n’est pas agité par les mêmes cas de conscience, il n’est pas condamné et, au contraire, son crime réussi ayant sauvé la situation, il peut jouir sans entrave du confort social apporté par son mariage.

La bague rebondit sur le parapet...
... scène annoncée en ouverture du film par la balle de tennis
qui heurte le filet avant de retomber.

vendredi 12 décembre 2014

Annie Hall (W. Allen, 1977)



Annie Hall Woody Allen Poster Affiche

Extraordinaire comédie de W. Allen, qui réussit ici à renouveler un genre majeur du cinéma américain en imposant sa patte comique si particulière.
En se mettant en scène, en ne se ménageant pas, en abordant de plein fouet sa propre histoire avec Diane Keaton, Woody Allen innove. Son prologue, en forme d'adresse à la caméra, est un bon résumé de son génie si inventif et particulier.

Annie Hall Woody Allen Poster Affiche

La narration est complètement libre (flash-backs, adresse directe au spectateur, monologues, etc.) et le film est très drôle, léger, avec une auto-dérision jubilatoire. Woody Allen, par l'intermédiaire d'Alvy, son alter ego, use de la parole, sans cesse, comme parade, pour exorciser l'échec, le mettre en mot, le circonscrire. Las, la parole – et c'est une des idées du film –, quand bien même elle est un flot incessant, ne peut rien pour recoller les morceaux entre Alvy et Annie Hall. Woody Allen parvient ainsi à peindre un tableau à la fois drôle et touchant, jubilatoire et désabusé, chaque phrase, chaque morceau de dialogue étant comme un coup de pinceau sur la toile.

Woody Allen reprendra souvent ce personnage décalé, drôle et désabusé, le faisant évoluer dans ce milieu juif new-yorkais, mais sans jamais, peut-être, parvenir à la même harmonie extraordinaire que dans Annie Hall.

Annie Hall Woody Allen Poster Affiche

lundi 9 décembre 2013

Prends l'oseille et tire-toi (Take the Money and Run de W. Allen, 1969)




Premier film très drôle de Woody Allen qui démarre sa très riche carrière par le burlesque.
Le film est porté de bout en bout par l’imagination débordante de son auteur. Woody Allen réutilisera de nombreuses idées qui sont déjà efficaces : histoire axée sur un petit personnage et racontée en voix off comme un documentaire, images d’archives détournées, fausse interview des protagonistes longtemps après les faits, etc.


Comme souvent chez Woody Allen, le héros Virgil est un raté qui cherche à exister, à sa façon (ici le petit malfrat veut devenir un gangster reconnu). Même ses parents ont honte de lui (et sont interviewés, affublés de masques de Groucho Marx, grande référence burlesque de Woody Allen). On reconnaît aussi le rapport aux femmes, fait de gêne, d’envie, de volonté de tout sacrifier qui sera, là aussi, retrouvé dans bon nombre de films du réalisateurs.
On suit donc avec plaisir l’invraisemblable et gaguesque cavale de Virgil, entrecoupée de hold-up ratés et d’évasions qui échouent tout autant.