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mercredi 25 septembre 2019

The King of Marvin Gardens (B. Rafelson, 1972)




Suivant un tempo tantôt un peu hasardeux et tantôt très maîtrisé, The King of Marvin Gardens déploie une étrange atmosphère, dépressive et abandonnée, assez typique de Bob Rafelson (et assez typique, aussi, de la période du Nouvel Hollywood). Et, progressivement, le réalisateur semble délaisser son histoire pour se centrer sur les personnages. Il se rapproche alors peu à peu des deux frères et les scrute au plus près.
David veut croire au rêve de son frère Jason, frère combinard, qui passe d’une embrouille à l’autre et croit sans cesse pouvoir se refaire dans un nouveau plan. David, qui réinterprète sa vie dans ses lentes émissions de radio, voudrait maîtriser ce destin et cherche à retrouver une complicité (complicité ancienne qu’il s’invente volontiers) avec son frère.
Le titre du film vient de la version américaine du Monopoly, qui met en scène différentes rues d’Atlantic City, Marvin Gardens étant la rue la plus chère du jeu, juste à côté de la case prison (en français le titre aurait pu être « le roi de la rue de la Paix »). Il faut noter qu’une faute d’orthographe émaille ce nom de rue, et, en réalité, il s’agit de la rue Marven Gardens. En insistant sur cette erreur, Bob Rafelson trouve ici une manière supplémentaire de mettre en scène les illusions de Jason.


Jack Nicholson est ici dans un rôle rare (et pas facile), en frère bien élevé, propre sur lui avec ses lunettes, loin de l’autre personnage central, magouilleur et sur la corde raide, qui oscille sans cesse entre exaltation et déception, et parfaitement tenu par Bruce Dern.

lundi 13 août 2018

Cinq pièces faciles (Five Easy Pieces de B. Rafelson, 1970)




Avec un style résolument moderne qui tourne le dos à Hollywood, Bob Rafelson cogne sur les stéréotypes de la petite société américaine. Le film reprend les grandes lignes de Comme un torrent de Minelli, qui entremêlait – avec une virtuosité incroyable – des situations et des personnages similaires.
Ici aussi, comme chez Minelli, Robert Dupea, le personnage principal est un intellectuel qui revient d'un voyage (en réalité une errance au cours de laquelle il a fait un peu tous les boulots), avec à ses basques une fille populaire (Karen Black, parfaite, avec ce léger strabisme qui la fragilise et donne une note vaine à son personnage) qui détonne dans le milieu familial de Robert. C’est que Rafelson n'y va pas avec le dos de la cuillère pour décrire cette famille intellectuelle guindée (le père est paralysé, le frère est engoncé dans une minerve) qui va être dynamitée par Robert.
En revanche Rafelson a le cran d'emmener loin son idée : Robert Dupea méprise à peu près tout le monde (autant le peuple que son milieu d'origine) et il devient vite antipathique (et encore est-il sauvé en partie par Jack Nicholson, pour lequel le spectateur a, malgré tout, une forme d'identification). C'est qu'il est animé, en réalité, par une insatisfaction permanente, qui le pousse à réagir sans cesse contre le monde qui l'entoure, qui le pousse à se lever et repartir, ce qu'il fait, en fait tout au long du film. Ces deux aspects sont un enrichissement par rapport à Dave Hirsch, héros de Comme un torrent.


Sous couvert d'une forme moderne, Cinq pièces faciles reprend donc des situations déjà vues dans le Hollywood classique. Mais il s'approprie ces situations en les mettant au goût de son temps, créant ainsi une belle passerelle entre le classicisme et le Nouvel Hollywood qui, chacun à sa façon, parlent de l'Amérique. Il faut dire que, si le cinéma américain a considérablement changé en une décennie (le temps qui sépare le film de Minelli de celui de Rafelson), les ressorts de la société américaine – inépuisable matériau de base des films – sont, peu ou prou, les mêmes.