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vendredi 24 mai 2019

L'Oiseau au plumage de cristal (L'uccello dalle piume di cristallo de D. Argento, 1970)




Très bon premier film de Dario Argento qui montre déjà à la fois sa grande maîtrise et son style très personnel dans une intrigue qui relance la mode du giallo.
Les codes du genre (genre déjà exploré avec maestria par Mario Bava) sont bien présents (le tueur aux gants, les armes blanches, la touche d’érotisme, etc.) et Argento distille savamment une dose de suspense qui tient le spectateur en haleine.
La célèbre séquence de la première agression, avec Sam (très bon Tony Musante) coincé dans les vitrines,  résume à elle seule le style d’Argento. Jouant sur les sons, les lumières, l’incapacité d’agir – alors que la femme ensanglantée s’affale au sol et que l’agresseur s’est échappé –, la séquence marque le spectateur et elle marque aussi Sam qui cherche à se remémorer ce moment pour retrouver un détail qui lui a échappé. Argento conduit alors son film autour de cet élément manquant mais qui nous a été montré – à nous ainsi qu’à Sam – et qui nous échappe. On sait que c’est une signature d’Argento de jouer ainsi avec l’image (jeu qui culmine dans Profondo Rosso où l’assassin est montré à l’image très tôt dans le film, sans que le spectateur ne le remarque).



Argento prolongera ce premier film (au travers de deux autres films aux titres animaliers qui constituent une première trilogie), déploiera incroyablement son style (dans une seconde trilogie avec Profondo Rosso, Suspiria et Infernoet, ensuite, reviendra à ce style inventif mais moins délirant, avec un scénario très proche de celui de L’Oiseau au plumage de cristal dans Ténèbres.

vendredi 8 mars 2019

Ténèbres (Tenebre de D. Argento, 1982)




Giallo assez classique de Dario Argento qui tourne le dos à ses expérimentations brillantes et délirantes (Suspiria ou Inferno) pour revenir, plus sagement, aux codes habituels du genre.
On ne retrouve donc plus ni le baroquisme échevelé ni l’ambiance de cauchemar typique du réalisateur, et le film semble beaucoup plus gris et terne. Mais il contient des fulgurances stylistiques avec une mise en scène très esthétisée des (nombreux) meurtres. On retient bien sûr la séquence de meurtre des deux lesbiennes, avec la caméra qui louvoie le long de la façade, la frôlant de très près, montant et descendant d’un étage à l’autre. Ces jeux de sang sur les corps nus, ces vitres fracassées, ces rasoirs en gros plans sont autant de jeux esthétiques très réussis.


L’histoire, bien entendu, vient en second plan et, à dire vrai, on n’est guère passionné par l’enquête policière et on se prend à attendre, tranquillement, le prochain meurtre et le moment où la prochaine victime sera suivie, surprise ou prise au piège pour être égorgée ou lacérée.
Mais, du fait de l’ambiance beaucoup plus traditionnelle et malgré les coups de force de la mise en scène, le film a davantage vieilli que Profondo Rosso ou Suspiria.

mardi 25 septembre 2018

Inferno (D. Argento, 1980)




Si Inferno est une fausse suite de Suspiria (on déambule à nouveau dans des maisons labyrinthiques et étranges qui cachent des sorcières démoniaques), on retrouve la même volonté de la part de Dario Argento de plonger le spectateur dans ce qui tient davantage d’un rêve morbide et angoissant plutôt que dans une histoire bien tenue et rationnelle.
Argento se soucie peu de la logique de son histoire, il se soucie tout aussi peu d’expliquer les choses : ce qui importe, pour lui, c’est bien plus de construire, à chaque plan, une ambiance folle, angoissante, baroque, délirante, étrange. Tout n’est pas expliqué (et tout n’a pas à l’être : comme ce cuisinier d’un snack-bar, averti par les appels à l’aide de l'antiquaire qui est en train de se faire dévorer par les rats et qui, au lieu de le sauver, vient l’achever à grands coups de couteau) et c’est un plaisir visuel avant tout que nous propose Argento.
De nombreuses scènes n’ont que très peu d’intérêt narratif mais sont splendides (la longue séquence aquatique dans la cave par exemple) et construisent peu à peu cet envoûtement qui prend le spectateur.



Le film souffre peut-être d’une bande originale moins happante que celle de Suspiria. En revanche, Argento semble prendre plus de plaisir encore à se libérer presque totalement des contraintes narratives et situe son film à mi-chemin entre un rituel de sorcières et un rêve étrange et inquiétant. Notons que Mario Bava, un des grands inspirateurs de Argento, a participé au tournage.



lundi 30 octobre 2017

Suspiria (D. Argento, 1977)




Extraordinaire film de Dario Argento, qui, sans chercher à dérouler une narration rigoureuse, plonge le spectateur dans une étrange poésie macabre, à l’atmosphère cauchemardesque.
Chaque séquence du film est faite d’une explosion de couleurs, de décors géométriques outranciers et de sons étranges qui créent une ambiance tour à tour terrifiante, angoissante, fantastique, baroque.
D’emblée, dans l’orage qui accueille l’héroïne, Argento pose les bases de l’angoisse, il file rapidement vers l’horreur avec le premier double meurtre qui arrive très vite – double meurtre incroyablement baroque et décalé – et le film se poursuit ensuite avec un ton fantastique qui s’affranchit de toute rigueur logique. C’est qu’Argento s’amuse de raccords très voyants mais difficiles à décrypter (on passe sans crier gare d’une pièce à une autre, sans comprendre les lieux) ou d’ellipses perturbantes. Et, bien entendu, le rouge pulsionnel qui envahit les décors (au milieu d’aplats de jaune, de violet, de bleu), accueille bientôt les premières éclaboussures de sang.



On retrouve dans le film les grandes lignes d’un conte morbide (l’action se passe à Fribourg, contrée des frères Grimm), et cette école de danse, sombre et inquiétante, où une sorcière célèbre ses cultes démoniaques, n’en finit pas d'envoûter et d’angoisser Suzy (Jessica Harper, parfaite avec ses yeux de biche apeurée).
On ne se soucie donc guère du réalisme de l’histoire (il ne s'agit pas de comprendre précisément qui tue tel ou tel personnage à tel ou tel moment de l’histoire), ce qui compte, ce sont les violets profonds des murs, les couloirs violemment éclairés de lumières tantôt chaudes et tantôt froides, les ombres derrière le paravent, les éclairs de l’orage qui éclate et les murmures incessants des sorcières qui hantent ce lieu maudit.

S’inspirant à la fois des frères Grimm, de Fellini (pour cette ambiance onirique qui laisse s’échapper le fil de la narration) ou de Mario Bava (on pense au baroquisme de Six femmes pour l’assassin), Argento articule son film entre giallo, fantastique et horreur. Et Suspiria laisse dans la tête du spectateur une angoisse prenante, des explosions de couleurs, comme autant d’aplats vifs et d’éclats soudains et, toujours, cette musique entêtante, incroyable ritournelle emplie des soupirs terrifiants des sorcières.