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lundi 27 avril 2015

Une femme sous influence (A Woman under the Influence de J. Cassavetes, 1974)




Film typique de Cassavetes, très âpre, difficile, qui explore chaque séquence jusqu'au bout d'elle-même, dans une espèce d'essentialisme forcené : Cassavetes ira au bout du bout de ce qui peut être sorti de la scène, de ce qui peut être extrait des personnages. Cette façon de filmer, radicale, rend le film lourd, difficile, ralentit le rythme (il se passe peu d’événements, chaque séquence s'étirant en longueur) mais peut hypnotiser le spectateur qui est pris dans les tourments de Mabel et de son mari, dans leur relation complexe, parfois malsaine, emplie d'explosions, de délires, d'exagérations, mais si humaine et si touchante.
Cassavetes met en scène le corps de l'acteur, son visage, avant même l'histoire de son personnage. Pour Deleuze c’est un cinéma du corps, c'est-à-dire qui cherche à s'approcher au plus près des personnages pour les sonder avec le maximum d’acuité.


On a, dans les relations qu'ont les personnages, une approche extraordinaire de la réalité des interactions : rien n'est si complexe, rien n'est si contradictoire, étrangement équilibré et instable qu'un couple.
Gene Rowlands est incroyable, toute de fragilité dans ses délires ; Peter Falk est touchant, explosif, blessé.
Une femme sous influence est un très grand film, dans un style unique, et puis, il faut bien le dire : on n’a jamais filmé comme Cassavetes.


jeudi 13 février 2014

Opening Night (J. Cassavetes, 1977)




Extraordinaire film de J. Cassavetes, âpre et difficile, assez hermétique même, comme le sont souvent les films du réalisateur, qui, comme à chaque métrage, fait durer chaque scène pour la presser à l’extrême, jusqu’à l’épuiser (avec notamment des plans-séquences très longs). C’est ainsi que les personnages vont et viennent, se fracassent contre la réalité. On retrouve donc cette forme d’essentialisme typique de Cassavetes : pas question de passer à autre chose tant que la scène n’a pas livré sa sève ultime.
La mise en abyme, à l’intérieur du film, entre une comédienne et le rôle qu’elle doit interpréter, fait bien entendu écho à la seconde mise en abyme entre l’actrice réelle (et non plus le personnage) et son rôle dans le film. En filmant le théâtre, Cassavetes explore ainsi la frontière entre la réalité et la scène, à tel point que cette frontière devient floue. Cassavettes reprend ainsi la principale trame d'Ève, où Bette Davis jouait le rôle d'une star vieillissante. Ici Myrtle (Gena Rowlands), actrice vieillissante, renâcle à jouer un rôle de femme vieillissante, jusqu’au drame (une fan meurt sous ses yeux). Cette mort faisant irruption dans sa vie accélère sa remise en question, et elle doit dépasser son propre regard sur sa vieillesse, sur son être finissant, pour ensuite pouvoir, peut-être, jouer cette pièce. On suit alors l’errance de Myrtle, sa frustration qui se perd dans l’alcool, son désespoir de ne plus être ce qu’elle était ; Myrtle qui se retrouve, se jette sur la scène, improvise. La dernière séquence (réellement improvisée par les acteurs – le script leur laissant toute liberté) est extraordinaire. La fusion du style Cassavetes prend corps.
Gena Rowlands est incroyable, pleine de cette classe qui lui est propre, un peu asymétrique et fragile, désenchantée. Comme souvent, Cassavetes, par sa manière de filmer (plan-séquence, cadrage serré, gros plans qui s’attardent, etc.) parvient à capter l’incandescence de son jeu d’actrice.
On tient dans ce film le très grand hommage d’un cinéaste iconoclaste au théâtre et au comédien.


Le film inspirera beaucoup, depuis Almodovar qui lance Tout sur ma mère de la même manière (un admirateur meurt dans un accident juste après avoir entraperçu la star), jusqu’à Innaritu dans Birdman (qui est un lointain descendant – lointain par sa médiocrité – d’Opening Night).