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mercredi 10 janvier 2024

Merci la vie (B. Blier, 1991)

 



Après une première moitié très décevante et peu intéressante, Merci la vie, brusquement, part dans tous les sens et devient joyeusement frappadingue sur le dernier tiers du film. On retrouve alors, après ce démarrage morne et poussif (comme si la machine parfois si parfaitement huilée du réalisateur patinait et tournait à vide), toute la verve de Bertrand Blier, sa manière de faire volontiers absurde, faisant feu de tout bois, sans se prendre au sérieux, égratignant son époque (le SIDA) ou jonglant avec l’histoire (la guerre contre les Allemands, entre résistance et déportation), jouant avec le cinéma lui-même (avec la mise en abyme répétée et souvent drolatique), brisant sans cesse le quatrième mur, emboîtant les séquences les unes dans les autres et jouant de champ-contrechamps excentriques. Le ton joyeux et décalé marche très bien avec le montage qui ne cesse de casser la narration dans tous les sens.
Il est bien dommage que Merci la vie soit si inégal, mais enfin, on reste sur un dernier long moment savoureux et détonnant et, vu le début du film, d’autant plus surprenant qu’il était inespéré.

 




vendredi 5 janvier 2024

La Femme de mon pote (B. Blier, 1983)

 



Petit film de Bertrand Blier, qui est bien loin de sa verve caustique habituelle, loin du regard au vitriol qu’il peut apposer sur la société, loin du monde absurde et désenchanté qu’il filme parfois. Il filme ici l’histoire de ce trio sans véritable punch, s’en remettant aux acteurs (assez peu convaincants il faut dire) et trouvant un ton un peu doux-amer mais sans verve. Le problème est sans doute que les trois personnages (formant un trio classique : deux amis amoureux de la même femme) restent enfermés dans leurs stéréotypes. Ils ne surprennent jamais, restant tout au long du film tels qu’ils nous sont présentés au départ. Et ce ne sont pas quelques saillies de dialogues qui peuvent donner une dimension supplémentaire aux personnages. Mais, comme souvent, Blier a du mal à s’approcher des crânes des personnages pour aller voir un peu ce qu’il en est à l’intérieur. Il reste à distance avec sa caméra et se garde d’aller voir au plus près, les filmant un peu comme au théâtre : il les regarde s’agiter mais il ne les épaissit pas. Coluche et Thierry Lhermitte peinent à émouvoir et Isabelle Hupert, pourtant capable de composition fulgurante, campe ici un personnage trop terne et monolithique.




samedi 16 décembre 2023

Beau-père (B. Blier, 1981)

 



En traitant de l’amour entre une adolescente et son beau-père, Bertrand Blier provoque encore et toujours. Mais, après les films plein de punch que sont Les Valseuses, Calmos ou Préparez vos mouchoirs, après le glacial et brillant Buffet froid, Blier s’assagit dans la forme et livre un film dont seul le sujet est provocateur (et non plus le ton ou la forme cinématographique).
Mais, dans ce cadre plus apaisé, Blier a plus de mal à filmer la douceur et les battements de cœur intime. Il s’en remet à ses acteurs, mais il a du mal à saisir, avec sa caméra, ce qui se trame derrière les yeux perdus des personnages. Patrick Dewaere joue de son habituelle fragilité d’écorché vif, même si son style passe moins ici dans ce film où il oscille entre le trop et le pas assez. On le préfère ou bien dans un registre plus comique (Préparez vos mouchoirs), ou bien plus libre et chien fou (Série noire) ou alors plus contenu et plus sobre (Hôtel des Amériques). Ariel Besse, du haut de ses quatorze ans, manque de charisme et de prestance. Sans doute faut-il à Blier de très grands acteurs pour parvenir à faire exister et à rendre crédibles ses personnages (ce qui explique le casting si souvent fameux de ses films). Ici, dans un rôle majeur, cette jeune actrice ne convainc pas vraiment.

 




lundi 13 juillet 2020

Les Valseuses (B. Blier, 1974)




Ce fameux film de Bertrand Blier est un grand coup de pied lancé contre la France giscardienne. Les deux compères Depardieu et Dewaere, trublions lâchés devant la caméra, franchissent sans cesse toutes les lignes jaunes que la société, dans ses normes tranquilles et bourgeoises, tend sous leur nez. Et l’on s’amuse de cette façon qu’a le film de toujours provoquer et de faire sans cesse des pieds de nez, rebondissant d’un fait d’arme à un autre, de petit délit en petit délit, d’une rencontre à l’autre, d’un vol de voiture à une course-poursuite ou à une tirade le nez au vent, déroulant un road-movie improbable et d’humeur joyeuse. Le rapport aux femmes est bien sûr au cœur des rencontres de Jean-Claude et Pierrot qui, non contents de s’accaparer Miou-Miou comme compagne de route, croise une adolescente (Isabelle Hupert), une femme allaitant son bébé (Brigitte Fossey) ou encore une femme mûre (Jeanne Moreau), au milieu de claques sur les fesses et autres facéties du même acabit.
Le film révèle évidemment le duo Depardieu – Dewaere (et il faut d’ailleurs tout le talent de Dewaere pour équilibrer la puissance de Depardieu) dont les facéties secouent constamment la torpeur de la France bien comme il faut.


Ce film représente parfaitement le ton acide et volontiers provocateur de Blier – et c’est là qu’est le meilleur de Blier –, dont la puissance corrosive s’émoussera rapidement (dès les années 80), en réalisant des films plus consensuels et qui n’ont plus la même légèreté insouciante.


lundi 6 avril 2020

Tenue de soirée (B. Blier, 1986)




Dans la même veine que Les Valseuses, Bertrand Blier peine à trouver avec Tenue de soirée le même souffle décoiffant et la même fraîcheur : ici tout est trop forcé et exagéré.
Alors bien sûr le ton et les situations sont volontiers provocants, mais le film recherche trop les punchlines qui font mouche et le baroque décalé et absurde cher au cinéaste (par exemple les interventions de Jean-Pierre Marielle ou de Bruno Crémer) est trop laborieux et étriqué.
C'est là qu'on comprend combien l'équilibre des meilleurs films de Blier est fragile et difficile à trouver : il en faut peu pour qu'un certain élan, une certaine originalité, un ton décalé deviennent trop vulgaires, trop exagérés, trop artificiels.


mardi 23 avril 2019

Notre histoire (B. Blier, 1984)




Si l’on retrouve rapidement l’univers typique de Bertrand Blier (une froideur décalée, un penchant pour l’absurde, des passages incertains entre rêve et réalité ou des acteurs qui jouent plusieurs personnages), Notre histoire a bien du mal à emporter le spectateur au gré de l’histoire.
La froideur volontaire des dialogues et cette façon de s’adresser directement au spectateur pour raconter l’histoire fonctionnent assez mal et tendent à l’effet inverse : au lieu de nous plonger dans l’histoire, on ressort constamment du film.

Alain Delon est en plus assez décevant. Il se heurte à son problème majeur : dès qu’il accentue un élément de son jeu, il en fait trop. Ses soupirs sont forcés, sa démarche est forcée, ses mimiques sont forcées. On le sait, Delon est condamné au naturel le plus absolu (il n’y a guère qu’en Tancrède, dans Le Guépard, que son punch passe bien). Nathalie Baye fait ce qu’elle peut pour se rendre distante et transparente, mais là aussi, dans le genre, on est bien loin des meilleures actrices (Catherine Deneuve par exemple). On peut en revanche s’amuser de voir les premiers pas de nombreux acteurs, réduits ici à de simples apparitions (Jean Réno, Vincent Lindon, etc.).


vendredi 25 janvier 2019

Calmos (B. Blier, 1976)




Après la frénésie des Valseuses, Calmos apparaît comme un ras-le-bol vociféré qui part dans un délire rarement vu au cinéma (les protagonistes finissant dans un gigantesque vagin...).
Jean-Pierre Marielle et Jean Rochefort s'en donnent à cœur joie dans leur misogynie exaspérée (leur rencontre dans la rue est très drôle puisque l'un et l'autre se lâchent sur une passante infortunée).
Bien entendu un tel film est une incongruité qui serait tout à fait inimaginable aujourd’hui (on imagine la tête du producteur devant un tel scénario). Et c'est peut-être là que réside la principale qualité du film : le droit au n'importe quoi, à l'excès (les deux compères transformés en étalon dans une usine à coïts), au foutraque (une armée de femmes en manque, chars à l'appui).



Si on reconnaît bien là la liberté de ton de Blier (Les Valseuses pulvérisait déjà la bien-pensance), il parviendra dans bien d’autres films – et avec beaucoup plus d'à-propos mais sans doute moins de folie douce – à cette liberté de ton qui lui permet de dresser, film après film, un portrait au vitriol de la société.

lundi 5 décembre 2016

Préparez vos mouchoirs (B. Blier, 1978)




Amusante comédie cynique qui doit beaucoup au duo Depardieu-Dewaere qui s'en donne à cœur joie. Les deux compères sont tout à la fois acteurs et spectateurs des situations qu'ils rencontrent et que Bertrand Blier n'hésite pas à emmener au bout d'elles-mêmes (Solange qui veut un enfant finit par être comblée par un adolescent).
Le film aborde de façon drôle mais très désabusée l’échec du rapport homme-femme. Certaines séquences sont très réussies (Dewaere et sa collection de polars et de disques de Mozart, ses réparties avec Depardieu) d’autres sont insolites ou provocantes, tout à fait dans le style de Blier.



mardi 9 février 2016

Buffet froid (B. Blier, 1979)




Très grande réussite de Bertrand Blier dans un cinéma absurde, froid, distant, au ton tragi-comique qui empile les cadavres et les situations ionesciennes. Dans ce film unique à bien des égards, Blier inverse tous les postulats habituels : les relations de cause et de conséquences ne fonctionnent plus, il filme normalement des scènes anormales, les réactions sont opposées à ce qui devrait être (l'assassin plus marqué par la mort de la femme que le mari). Cette inversion ne pouvait se faire qu'une fois : Blier ne procèdera plus de la sorte. Lui qui aime choquer ou bien par le ton (Les Valseuses), le sujet (Beau-père) ou désarçonner le spectateur ne jouant de la grammaire du cinéma elle-même (Merci la vie), explore ici l'absurde, se rapprochant de l'univers de Buñuel (celui du Fantôme de la liberté ou du Charme discret de la bourgeoisie). Depardieu, Blier père et Carmet sont parfaits dans des rôles au ton très difficile à trouver. Michel Serrault épate dans la légendaire séquence d'introduction (séquence très difficile à jouer, où tout ne tient qu'à un fil).
Les décors épurés, géométriques, dans une urbanité déserte d’abord, puis dans une nature froide, participent au ton étrange et irrationnel du film. Ils construisent un univers de solitude et de déshumanisation qui entoure et étreint les personnages.
Les dialogues sont savoureux, dès la première séquence qui installe le spectateur dans l’univers de Blier et donne d'emblée le ton du film, celui d’un humour noir un peu mélancolique, à la fois grinçant, solitaire et désabusé.