Affichage des articles dont le libellé est Capra Franck. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Capra Franck. Afficher tous les articles

mercredi 26 avril 2023

Milliardaire pour un jour (Pocketful of miracles de F. Capra, 1961)

 



Ce dernier film de Frank Capra est un remake de Grande Dame d’un jour, mais en plus long et avec davantage de moyens qui envahissent l’écran (le casting, les studios, les décors, etc). Milliardaire pour un jour, comédie volontiers burlesque, est empli de bons sentiments où même les gangsters n’en sont pas vraiment : Glenn Ford en bootlegger dandy apporte son charme particulier sans qu’aucune mauvaise onde ne traverse le film. Mais l'histoire, sans être désagréable, n’est guère prenante et l'on suit sans réellement se passionner les aventures de cette clocharde autour de laquelle on s’agite.
On notera néanmoins le rôle de Peter Falk – alors habitué aux seconds rôles – dont le personnage, par son look, annonce Columbo, alors que la fameuse série ne débutera que quelques sept années plus tard. Bien sûr le personnage n’a rien d’un lieutenant de police, mais, avec le même imper, le même chapeau et la même façon de tenir son cigare en se grattant la tête, toute la dégaine de Columbo est déjà là.





lundi 28 mars 2022

Les Horizons perdus (Lost Horizon de F. Capra, 1937)





Avec La Vie est belle, Les Horizons perdus constitue l’autre sommet de l’œuvre de Frank Capra. Sous la forme d’un conte philosophique, Capra dépasse ses utopies gentiment naïves (Vous ne l’emporterez pas avec vous par exemple) et emporte le spectateur dans une fable étrange, exotique et merveilleuse.
Chez Capra, Shangri-La est un monde hors du monde, préservé des hommes et de leurs vices (la jalousie, le profit, etc.) et dont il ne reste que les vertus de tempérance et d’humilité. Il faut toute la foi de Capra pour rendre crédible cette société perdue dans la montagne, pour la dessiner et la faire vivre sous nos yeux. Les scènes avec le Grand Lama sont emplies d’une spiritualité douce et très belle.



L’habileté du film consiste à parachuter plusieurs personnages dans cette vallée isolée, personnages qui n’y trouvent pas tous, d’emblée, leur Shangri-La. Si Colman (très bon Robert Conway) est tout de suite en syntonie avec le lieu, d’autres passagers mettent des semaines à oublier leurs ambitions et les vices avec lesquels ils sont venus, quand le frère de Colman, lui, ne se sentira jamais apaisé et devra repartir. C’est que le Shangri-Là, nous dit Capra, est une affaire personnelle. Il nous exhorte d’ailleurs, en fin de film, à croire en ce postulat merveilleux qu’il y a, pour chacun de nous, un monde où l’on sentira, immédiatement, que c’est là l’endroit qui nous convient, qui nous répond, avec lequel l’harmonie a lieu. On retrouve d’ailleurs la même exhortation à la fin de La Vie est belle (où Capra nous pointait du doigt en nous disant de prendre conscience de notre vie merveilleuse).
Pour Capra, Shangri-La est une vallée perdue et inaccessible au fin fond de l’Himalaya, pour d’autres ce sera un home calme et tranquille au creux de la campagne, pour d’autres un petit val qui mousse de rayons, pour d’autres encore le charme particulier de tel quartier d'une grande ville ou la place calme et sereine d’un petit village. Cerca trova comme disait Vasari.


vendredi 23 juillet 2021

L'Athlète incomplet (The Strong Man de F. Capra, 1926)



S’il est intéressant de voir le premier film de Franck Capra – qui commence donc son immense carrière dans le burlesque pur et dur –, L’athlète incomplet, néanmoins, est loin des prestigieuses références du genre, en particulier Chaplin, modèle avoué de Harry Langdon, qui apparait comme un succédané très limité. Le film, s’il est organisé en plusieurs parties, ne réussit guère à travailler son personnage qui, finalement, déploie ses simagrées et ses acrobaties en différents lieux un peu comme on changerait les décors au théâtre.
Si, en 1926, le film a su trouver son public, aujourd’hui ce burlesque forcé et trop répétitif ne fonctionne plus guère. Il permet néanmoins de mesurer, si besoin était, tout le génie d’un Chaplin, dont le comique, au contraire, ne vieillira jamais.


 

vendredi 27 novembre 2020

La Blonde platine (Platinum Blond de F. Capra, 1931)

 


Comédie hollywoodienne de Franck Capra, réalisée avant qu’il ne devienne le réalisateur star du genre quelques années plus tard avec New York-Miami.
Brodant sur des thèmes classiques (la presse à scandale, les potins mondains, etc.), Capra développe des sujets qu’il retraitera par la suite avec succès, notamment l’opposition  entre les gens simples et la grande bourgeoisie (que l’on reverra dans Vous ne l’emporterez pas avec vous par exemple).

Robert Williams (dont c’est le seul grand rôle puisqu’il mourra peu après, avant même la sortie du film) trouve le ton juste de la comédie : décontracté et prenant une distance ironique et désabusée. Jean Harlow, de son côté, a déjà le peps de ces futurs grands rôles. L’ensemble est malheureusement assez prévisible mais reste plaisant, même si Capra est encore loin de la maîtrise tout en aisance de ces futurs chefs d’œuvre.


vendredi 22 juin 2018

Un trou dans la tête (A Hole in the Head de F. Capra, 1959)




Petit film de Capra, qui revient à la réalisation de longs-métrages après une pause de plusieurs années (pendant lesquelles il a travaillé pour la télévision). Son optimisme teinté de naïveté semble s’être accru puisqu’il a fait disparaître les quelques méchants qui peuplaient ses films : pas d’arrivistes dans ce film, ni de politiciens sans scrupules ou de financiers avides. Autour de Tony Manetta (Frank Sinatra), petit bidouilleur ambitieux mais assez peu capable de s’en sortir, ne gravitent finalement que des gens qui l’ont en estime. C’est l’incapacité propre de Tony, qui prend sans cesse de mauvaises décisions, qui lui rend la vie difficile. Dans ce sens le monde de Capra s’est encore détaché de la vie réelle.
Mais le côté fable moralisatrice a disparu également et une nonchalance pleine de maturité ressort du film : en cessant d’opposer des mondes différents, Capra dégage une atmosphère sans onde négative, dont le ton oscille entre la comédie et la mélancolie.



Capra parvient à peindre de façon assez fine son personnage principal, perdu dans une grande solitude, qui fait ce qu’il peut mais dont les carences affectives (il est veuf), malgré la présence de son fils, le rendent incapable de rien faire d’autre qu’affleurer à la surface des choses et être constamment en porte à faux avec la réalité, d’où ses flirts ou sa gestion calamiteuse. Le film correspond pour Tony à une lente prise de conscience de ce qu’il est un bon-à-rien, ce que lui répète son frère grincheux (Edward G. Robinson, très drôle), tout au long du film.

samedi 10 octobre 2015

La Vie est belle (It's A Wonderful Life de F. Capra, 1946)



La Vie est belle Franck Capra

Le chef-d’œuvre absolu de Capra. Il réussit ici ce qu’il a tenté avec plus ou moins de succès dans beaucoup d’autres films, en particulier un élan optimiste parfois un peu béat, qui fait triompher ses héros dans des happy ends trop sucrés. Rien de tout cela ici, où le fantastique cède le pas au merveilleux avec une séquence finale éblouissante.
Capra réussit d’abord l’équilibre rare et difficile entre la comédie et le drame. L’écart entre la scène du bal et l’erreur réparée de justesse du pharmacien parvient à tenir au sein d’un même film. Pour relier le tout, Capra possède en Stewart un acteur exceptionnel qui s’offre son plus beau rôle – un rôle très difficile – où, comme toujours, il parvient avec un naturel confondant à trouver le juste ton pour ce héros plein d’espoir puis désespéré ,puis sauvé à la dernière seconde.
La narration est délicieuse : c’est un long flash-back sur l’ensemble du film (on ne revient au récit initial que dans la dernière partie) avec la vie de George Bailey racontée à un ange. La dernière partie du film trouve elle aussi le juste ton, entre l’affolement progressif de Bailey et l’étrangeté clownesque de l’ange Clarence.

Bien entendu, comme dans nombre de ses films, mais ici avec une volonté d’en faire le tour, Capra revisite les valeurs américaines. Si parfois il en fait trop (Vous ne l’emporterez pas avec vous est fatigant de lourdeur par moment), ici l’équilibre est parfait et le film est un résumé des principales valeurs américaines, mais revisitées par Capra qui en donne une version toute personnelle.
Le film aborde évidemment la foi en Dieu qui soutient l'Amérique, qui aide les Américains, et, ici, qui intervient même directement. Sont ensuite abordées toutes les parfaites valeurs américaines : l’idée de partir à l'aventure à la découverte de l’Amérique et du monde, la liberté, l’indépendance, l’individualisme du self made man et la mise en place d’une communauté (comme lorsque les colons sont arrivés au XVIIe  siècle). Toutes ces valeurs sont celles du jeune George.
Mais Capra propose, très habilement, sa propre version de ces valeurs américaines :
- George Bailey a un rapport intime à Dieu (par l'intermédiaire de son Ange) ; à la fin du film il apparaît même comme un saint : alors que tous prient pour lui, un ange intervient et tous lui offrent de l’argent (en échange des sacrifices qu’il a faits).
- il se sacrifie en renonçant à ses idéaux (parcourir le monde, faire des études, gagner beaucoup d’argent) au profit de la famille, de ses amis : il trouve son épanouissement au sein de la communauté ;
- il se bat, non pas pour un ailleurs idéal, mais pour sa ville (version humble et concrète de ses grandes idées) ;
- il reste indépendant et libre (face au grand propriétaire qui veut le racheter) ;
- il est l'homme le plus riche de la ville : riche de ses amis, des gens autour de lui, il n'est pas seul (Potter, lui, est solitaire).
Finalement, pour Capra, on est heureux non pas en cherchant à réaliser des rêves de grandeur mais humblement, dans une vie ordinaire, entouré de ses amis et de sa famille. Cette vision somme toute très traditionnelle est exprimée avec une foi éblouissante : il s’agit à chaque fois d’exprimer une version altruiste de valeurs individualistes.
L’humilité du cadre tranche avec l’ambition du film : quand, dans L’Homme de la rue, Capra s’adresse directement à l’Amérique entière, ici il se concentre sur une petite communauté (en tournant entièrement dans un gigantesque décor). Cela lui permet d’exprimer le fond de sa pensée : les actes de chacun ont des conséquences, de ricochet en ricochet, sur tous les autres. On rejoint des thèmes développés par Levinas, en particulier la responsabilité de chacun pour autrui.

L’intervention de l’ange interpelle à la fin du film : s’agit-il réellement d’un happy end ? La séquence finale, empreinte de la magie de Noël, incite à une lecture miraculeuse, hors du cours des événements : il s’agit bien plus d’un moment de grâce, comme le cinéma en offre parfois (Voyage en Italie, Ordet…), mais rarement avec cette succession soudaine d’une grande tristesse et d’une grande joie.

On préférera le titre original qui est comme une adresse au spectateur : It’s a wonderful life, c’est Capra qui nous dit « vous avez une vie merveilleuse !», quand bien même nos rêves d’exotisme, d’ailleurs, de grandeur, de réussite s’évanouissent, comme se sont évanouis ceux de Georges Bailey. Il suffit juste de parvenir à voir comment sont les choses.
On est ici dans une version élaborée du schéma classique américain des films de l’époque : le récit principal, dans lequel est enchâssé le long flash-back, a une durée d'action très courte, une demi(heure tout au plus. Et, à la fin de ce laps de temps ancré dans la nuit de Noël, il ne s’agit pas d’une évolution de la situation de départ, ni même d’une compréhension plus fine de celle-ci (comme dans L’Homme qui tua Liberty Valence où le film permet de comprendre la réalité du dénouement, derrière ses apparences), mais il s’agit d'une simple différence de perception. Deleuze parlait de la crise de l’image action à propos de L’Homme qui tua Liberty Valence,  ici les choses sont plus abouties encore : il n’y pas d’erreur sur la compréhension du déroulement d’une action comme dans le film de Ford, il y a simplement la volonté de voir autrement les choses. C’est l’optimisme empli de foi du film qui nous y incite.
Le clin d’œil final, avec la petite clochette qui tinte, est tout à la fois éblouissant et charmant.

La vie est belle Georges Bailey James Stewart Franck Capra

mardi 2 septembre 2014

New York-Miami (It Happened One Night de F. Capra, 1934)




Très célèbre comédie de Capra, qui pose plusieurs bases du genre et qui a, aujourd’hui encore, un charme certain. Il s’agit du premier road-movie du cinéma mais dont le trajet est inverse à celui du titre français, bien malvenu. Ce parcours à la fois hors des grandes villes et hors de la société permet à Peter et Ellie de se révéler à eux-mêmes autant qu’à l’autre. Ils sortent ainsi des caricatures faciles auxquelles le début du film les avait confinés (le journaliste arriviste et l’enfant gâté capricieuse).
Capra lorgne du côté des récits d'aventures et se permet de multiples connotations sociales qui sont autant de mini-divergences et qui viennent enrichir le récit (la mère qui tombe d’inanition par exemple, etc.) et apporter des touches insolites amusantes.
La situation plusieurs fois reprise du drap tendu en un mur de Jéricho est très bonne et permet un happy end final qui boucle la boucle. A ce final fait écho le titre original, « It Happened One Night », étonnamment osé pour l’époque (puisqu’il fait bien allusion à ce qui se passe la nuit).
Et puis, il faut bien dire, Clarke Gable croque des carottes comme personne (il a même, semble-t-il, inspiré le personnage de Bugs Bunny).



mardi 5 août 2014

L'Extravagant Mr. Deeds (Mr. Deeds Goes to Town de F. Capra, 1936)




Comédie populiste américaine typique, dont le ton et la morale sont habituels chez Capra (on est ici très proche de L’Homme de la rue).
Le film reste loin des grands chefs-d’œuvre du réalisateur, mais il est porté avec bonheur par Gary Cooper, dont le naturel sobre fait merveille. Il incarne avec facilité Longfellow Deeds, cet homme simple qui, malgré les millions dont il hérite, aspire à le rester. Le film est ainsi un hymne à la vie retrouvée (Capra se permet de citer Thoreau), aux relations de proximité entre les gens, à la ruralité, qu’il oppose à une élite métropolitaine corrompue et avilie.
On regrettera peut-être que le film tire un peu trop, parfois, sur quelques grosses ficelles (Deeds qui reste silencieux lors de son procès par exemple).


jeudi 20 septembre 2012

Monsieur Smith au Sénat (Mr. Smith Goes to Washington de F. Capra, 1939)




Beau film de Capra qui livre une charge à la fois très critique mais aussi pleine d’espoir sur le fonctionnement de la démocratie américaine.
Capra, avec une facilité de ton étonnante, parvient à équilibrer la critique – qui a forcément des relents pessimistes (à voir la collusion des intérêts particuliers des élus qui roulent pour eux, des médias et des industriels) – avec un ton optimiste, venant à la fois du jeu de Stewart et du regard du réalisateur sur son personnage.
La performance de James Stewart est remarquable (comme toujours) bien épaulé par une brochette de seconds rôles efficaces. Cet ensemble équilibré possède un charme typique de Capra qui a foi en ce qu’il filme et qui croit en ces valeurs que le jeune Smith porte haut et fort.



L’idée de mettre un personnage simple et provincial dans le panier de crabes du Sénat fonctionne parfaitement : Capra montre les idéaux qui habitent cet homme (faisant une leçon d’éducation civique très didactique) et l’entre-soi des élus qui déshonorent leur fonction en faisant fonctionner toute la machinerie institutionnelle à leur propre profit.



Si Capra prend garde d’amadouer les critiques en montrant un président du Sénat compatissant qui fait un lien entre le jeune Smith et les spectateurs, il n’hésite pas par ailleurs : le sénateur Taylor incarne l’absence de civisme et de morale de ces représentants qui subvertissent leur fonction, recourant sans hésiter à de la diffamation, des menaces, de la corruption pour arriver à leurs fins. Mais Capra n’est pas là pour décrire un monde pourri et sans espoir. Au contraire, au milieu d’élus qui mettent à mal le système, Jefferson Smith est cet espoir auquel s’accroche le spectateur, espoir selon lequel tout peut encore être sauvé.