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lundi 30 novembre 2020

Du mouron pour les petits oiseaux (M. Carné, 1963)



Comédie bien décevante de Marcel Carné, qui peine à retrouver sa verve et l’équilibre de ses films de sa période d’avant-guerre.
Ici tout semble un peu outré, un peu forcé et s’il y a bien un regard sur Paris et ses mœurs et si Carné cherche à caractériser des personnages (le concierge, le flic proche des anciens truands, le boucher trompé, etc.) la sauce ne prend guère et l’on reste bien détaché de tout ce petit univers. La faute sans doute au ton du film – celui d’une comédie qui, se veut tantôt farfelue, tantôt mi-sérieuse mi-caustique – et au rôle central de Paul Meurisse décidément bien peu à l’aise dans les comédies où son cabotinage passe mal (que l’on compare ce rôle ou celui campé dans Le Déjeuner sur l’herbe avec ses prestations dans Les Diaboliques ou Le Deuxième souffle).

 

mercredi 16 août 2017

Thérèse Raquin (M. Carné, 1953)




Petite réalisation de Marcel Carné, qui s’éloigne du roman de Zola et n’en tire qu’un film de second rang. L’interprétation est assez quelconque (même si le rôle de la mère Raquin est bien tenu) et les modifications scénaristiques ne sont pas heureuses. Un élément essentiel du roman en particulier a disparu : c’est la présence perpétuelle de Camille, le mari trompé et tué, qui s’interpose indéfiniment entre les amants. Ce ressort angoissant disparaît ici et vide le récit d’une grande partie de sa tension. Ces angoisses sont ici remplacées par la présence d'un maître-chanteur mais cette idée, très banale, n'est pas très heureuse.

lundi 2 janvier 2017

Hôtel du Nord (M. Carné, 1938)




Très célèbre film de Carné (avec sa fameuse réplique en forme d’atmosphère) qui est pourtant un ton en-dessous de ses plus grandes réussites. En effet, si le brio des acteurs (Jouvet, Arletty ou Blier) emporte le film, celui-ci pâtit du couple Annabella-Jean-Pierre Aumont, important dans l’histoire mais trop fade à l’écran. Il faut dire que le couple Jouvet-Arletty écrase le film, de par le décalage entre le jeu exubérant de l’une et celui, sobre et fascinant, de l’autre. Et comme ce déséquilibre n’est guère compensé, le film semble alors plus artificiel que Le Quai des brumes ou Le Jour se lève (entre lesquels il s’intercale dans la filmographie du réalisateur), pourtant tournés comme lui en studio, mais qui dégagent une harmonie et une puissance visuelle supérieure.
La poésie du film (qui n'est pas du tout réaliste pour le coup, malgré l’étiquette habituelle de « réalisme poétique » que l’on colle à Carné) s’étend néanmoins, notamment au travers de ce mélange entre le ton, tragique et pessimiste, et les personnages pittoresques et hauts en couleur.


mardi 22 novembre 2016

Le Quai des brumes (M. Carné, 1938)




Film remarquable, envoûtant et très sombre, où Marcel Carné, depuis ses studios, parvient à emporter le spectateur bien loin de son fauteuil, dans ces brumes incessantes du Havre, mélangeant parfaitement le réalisme social (le soldat déserteur, le monde populaire, la pauvreté, le bar de Panama) et la poésie (la relation construite pas à pas entre Jean et Nelly est très belle, de même les personnages qui se croisent chez Panama).
Les acteurs sont fabuleux. Gabin est fascinant : il parvient, en un éclat brisé de son regard, à renvoyer à son passé insondable de militaire, au malheur, à sa vie finie. Michèle Morgan – dix-sept ans – promène son regard cristallin, qui reste lumineux malgré tout ce qu’elle a subi ; Michel Simon compose un Zabel épouvantable et visqueux et Pierre Brasseur un avorton lâche et détestable.
Au-delà de la célébrité du film et de sa fameuse réplique, on tient là un chef-d’œuvre de la période, avec la poésie noire et lyrique du duo Carné-Prévert.



lundi 8 août 2016

Le Jour se lève (M. Carné, 1939)




Très grand film du cinéma français, réalisé par un Marcel Carné qui maîtrise les studios de main de maître (notamment au travers de cette fameuse chambre où Gabin s’enferme comme un forcené). Le film est techniquement parfait et Carné innove en utilisant des flash-backs. Cela lui permet de commencer par l'aspect tragique du drame (le coup de feu) puis de remonter aux sources de cette histoire somme toute très classique (l’ouvrier amoureux de la fleuriste et bientôt jaloux). Carné rebondit sans cesse avec facilité pour dérouler impeccablement son histoire.
Carné teinte son fameux réalisme d’une certaine poésie (on sent l’influence de Prévert même si elle n’explose pas encore comme dans Les Enfants du Paradis) et il parvient – de par ses allers retours entre passé et présent – à faire glisser sans cesse ses personnages du bonheur intense de l’amour à la douleur la plus poignante (exceptionnelle composition de Gabin, que l’on voit tour à tour transi d’amour ou désespéré). Ce rôle de Gabin, interprétant François, l’ouvrier jaloux ("Mais tu vas la taire ta gueule !"), est resté très célèbre. De même, Jules Berry et Arletty sont parfaits.
Si le film est, au niveau formel, tout à fait parfait, on n’y trouve toutefois pas la même beauté poétique que dans Les Enfants du paradis, ni le génie bouillonnant de Renoir (celui de La Règle du jeu par exemple).


jeudi 11 septembre 2014

Les Enfants du paradis (M. Carné, 1945)




Film célèbre et éblouissant, Les Enfants du paradis est un incontestable chef-d’œuvre. Marcel Carné et Jacques Prévert trouvent ici un ton parfait, à la fois dans l’équilibre entre l’aspect romantique et l’aspect théâtral, mais aussi dans le portrait d’individus très contrastés. Et Carné parvient, en plus de ces portraits travaillés d’individus, à reconstituer la vie foisonnante du boulevard du Crime dans le Paris du XVIIIème siècle. Malgré les contraintes du tournage en pleine guerre, malgré la censure de Vichy, une poésie inaltérable, gracieuse, et très belle enrobe le film.

Le boulevard du Crime
Le film est porté par des acteurs extraordinaires, dont le jeu permet de dépasser le classicisme de la mise en scène de Carné et d'inscrire l'oeuvre dans la mémoire des spectateurs, en particulier Arletty (délicieuse en Garance), Jean-Louis Barreault (qui joue à merveille le mime Deburau), Pierre Brasseur (son Frédérick Lemaître est inoubliable) et Marcel Herrand qui compose un Lacenaire fascinant.

Marcel Herrand en Lacenaire
Il est remarquable que, alors que les dialogues de Prévert sont célèbres à juste titre, le numéro de mime de Jean-Louis Barrault, soit lui aussi inoubliable. L’idée de départ était d’ailleurs un film sur le mime Deburau, mais il est devenu, en plus de ces scènes de mime, un des plus beaux films de dialogues. On a en effet un superbe entremêlât de tons, avec la gouaille naïve d’Arletty, la verve de Pierre Brasseur, la causticité de Marcel Herrand ou encore la froideur hautaine de Louis Salou.
C’est ainsi que se dessinent des personnages variés, poétiques, rêveurs, ambitieux, orgueilleux ou idéalistes. Et c’est cette galerie de personnages qui épaissit le film et l’enrichit remarquablement, bien plus que les relations entre les personnages, qui sont en fait assez sommaires (relations d’amour et de jalousie principalement).
Ces récits entremêlés convergent tous vers la même triste conclusion : celle de l’impossibilité de l’amour à rendre heureux. Les amours légers de Frédérick Lemaître, aussi bien que l’amour romantique de Baptiste ou celui possessif de Nathalie, rien n’y fait, chacun des personnages, à sa façon, vit tristement.
Cette conclusion, un peu simple et naïve (on a là la touche de Prévert…) mais touchante, tranche avec le ton du film, en particulier sa première partie, enlevée et truculente.

On se souvient que Truffaut, encore critique, éreintait Carné de ses critiques acerbes, avant de lui avouer, bien plus tard, devenu réalisateur, qu'il donnerait tous ses films pour avoir réalisé Les Enfants du paradis...

Jean-Louis Barrault et Arletty