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samedi 8 février 2025

Splendor (E. Scola, 1989)

 



Approchant de la soixantaine et après plus de trente ans derrière la caméra, Ettore Scola propose avec Splendor un film hommage au cinéma – cinéma en tant qu’œuvre et en tant que milieu de rencontre entre spectateurs et films – avec cette évocation un peu triste et nostalgique d’une salle qui, après tant d’années, va fermer.
Si les flash-backs ne sont pas toujours très harmonieux, le film distille en revanche une réelle nostalgie du cinéma d’avant et il cite une multitude de films, depuis Les Fraises sauvages à La Nuit américaine en passant par La Grande Guerre avec, au cœur de ces évocations, La Vie est belle, dont la fameuse séquence montrée (James Stewart courant fou de joie dans la neige) participera du miracle final, dans une très jolie scène.
Il est difficile de ne pas penser à Cinéma Paradiso, sorti l’année précédente, et qui joue aussi de la même nostalgie. Et, même si le film de Tornatore n’est pas sans défaut, on se souvient de sa fameuse dernière séquence – avec les baisers collés bout à bout. Il est saisissant de voir combien deux films sur le même thème mais jouant d’une approche un peu différente finissent, l’un et l’autre, par une irruption puissante du cinéma face aux personnages, comme autant de miracles (les baisers coupés enfin dévoilés pour l’un ; les spectateurs qui affluent sous la neige chez l’autre).

 

samedi 3 octobre 2020

Parlons femmes (Se permettete parliamo di donne de E. Scola, 1964)



Dans la lignée des Monstres, Ettore Scola s’amuse comme un fou à mettre Vittorio Gassman – tantôt macho séducteur à l’italienne, tantôt faible et lâche, tantôt profiteur, etc. – aux prises avec des femmes tout à tour pulpeuses, mariées, prostituées, lascives, soumises, etc. Même si les sketchs sont inégaux, le ton volontiers irrévérencieux fonctionne à plein et la drôlerie n’empêche jamais un regard plus caustique sur l’Italie, sa société et ses mœurs. Comme toujours avec des films à sketchs, cette multitude de situations et de personnages s'assemble et dresse un portrait savoureux de l’Italie.
Et même quand le regard moqueur de Scola se fait aiguisé et plus satirique, on sent combien il aime ces Italiens, avec leurs tares, leurs manières et leur honneur. Le sketch où lequel Gassman reconnait dans le mari de la prostituée un ancien camarade ainsi que celui qui clôt le film (il cherche vainement un endroit où passer une heure avec sa belle du jour) sont exceptionnels : drôle, grinçant et avec cette tonalité si typique de la comédie italienne.



mardi 3 octobre 2017

Nous nous sommes tant aimés (C'eravamo tanto amati de E. Scola, 1974)




Très beau film de Ettore Scola qui brosse un portrait de l’Italie sur trente ans, avec finesse, drôlerie, tendresse, mais aussi beaucoup de mélancolie et une certaine dureté désabusée.
Film sur le temps qui passe (le titre évoque cette sensation, cette mémoire), les différents parcours de ces trois hommes, unis, puis désunis, illustrent cette Italie qui perd progressivement son euphorie qui faisait suite à la seconde guerre mondiale. Le bilan de ces trente ans d’existence est d’ailleurs sombre : que sont devenus ces idéaux et ces belles idées ?
L’interprétation est magistrale et le film est émaillé d’idées remarquables pour exprimer les sentiments (par exemple les scènes de déclaration d’amour entre Gianni et Luciana, en figeant les autres acteurs, faisant écho à la pièce de théâtre évoquée un moment auparavant). On regrette que, parfois, la mise en scène soit si visible (les arrêts sur image du début, repris en fin de film).


La très belle déclaration d'amour...
... avec le monde qui se fige autour


Scola met en scène une narration en flash-back (Gianni amorce un plongeon qui s’achèvera à la toute fin du film) avec plusieurs narrateurs successifs. Il appuie son film avec de nombreuses références cinématographiques (on croise des évocations de De Sica, Eisenstein) qui viennent épaissir le récit et participer à la mise en abyme du film. C’est l’occasion pour Scola de discuter (avec ironie) du pouvoir du cinéma et de son rôle politique. Et la séquence reconstituant le tournage de la Dolce Vita est très réussie et confine au burlesque (Antonio l’ambulancier est appelé sur le tournage, aux abords de la fontaine de Trévi, c’est lui qui finira dans l’ambulance). Les rapports du film avec le cinéma sont d’ailleurs très complexes, puisqu’ils vont de la simple allusion, à la reconstitution d’une séquence de tournage en passant par l’intervention de Vittorio de Sica lui-même, qui parle du Voleur de bicyclette. C’est ainsi que le cinéma (italien en particulier), en faisant écho à différents moments de vie des trois amis, sert de liant et d’arrière-plan à leurs histoires.
Le constat final (« Nous voulions changer le monde et c’est le monde qui nous a changés ») est celui d’un échec, quelle que soit, par ailleurs, la réussite sociale ou non des trois personnages. L’importance du cinéma dans le film et cet aphorisme final ramènent forcément à André Bazin lorsqu’il dit que « le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs ». Le monde réel – l’Italie de 1974 –, même avec ce cinéma, dont on ne sait s’il est un support de rêve ou s’il est désenchanté, semble alors bien désespéré.