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lundi 3 mai 2021

Les Amants passionnés (The Passionate Friends de D. Lean, 1949)

 

David Lean reprend ici le même cœur de film que son chef d'œuvre Brève rencontre – avec lequel il forme une sorte de diptyque (d’autant qu’il s’appuie à chaque fois sur Trevor Howard) – mais sans atteindre la même puissance émotionnelle. Ici le duo est plus complexe, avec le mari trompé (joué par Claude Rains) qui est beaucoup plus présent dans l'intrigue, et il s'étale sur des années, années d'hésitations, d'oublis et de retrouvailles. Mais Ann Todd est bien moins expressive que Célia Johnson et les déchirements ne surgissent pas de la même façon à l'image.
La fin, pourtant est très réussie, avec le même jeu autour de la tentation du suicide que dans Brève rencontre (ici en se jetant sous un train, là sous un métro).



mercredi 21 avril 2021

La Route des Indes (A Passage to India de D. Lean, 1984)



La Route des Indes nous plonge dans l'Inde des années 20 et, si David Lean sait filmer avec majesté les fleuves, les flancs de montagne, les lumières ou les foules, il ne cherche pas à retrouver le légendaire lyrisme de Lawrence d'Arabie. Ici Lean, au contraire, et paradoxalement, presque, cherche à scruter au plus près ce qui traverse le cerveau de ses personnages, aussi bien Adela, remplie d'émotion par l'Inde, que Aziz Ahmed, le docteur qui admire, dans un premier temps, l'Empire britannique, avant de s'en détourner, subissant un opprobre injuste. Ahmed symbolise d’ailleurs parfaitement l’Inde : tenté par l’Empire britannique qu’il admire, vêtu à l’occidental, volontiers ami (et obséquieux) avec les Anglais, il rompt complètement après son procès, redevenant Indien de cœur et d’allure. Ce regard sur le personnage, allié à l’émotion de la jeune Anglaise découvrant l’Inde et ses charmes est tout à fait réussie. La Route des Indes annonce alors parfaitement, avec un quart de siècle d’avance, la rupture profonde qui va s’opérer entre ces deux pays qui, bien que proches et liés, irrémédiablement, vont se séparer.
On reste en revanche plus réservé sur le personnage campé par Alec Guinness : le professeur Godbole évoque irrésistiblement l'ami Peter Sellers, ce qui donne une touche comique involontaire au personnage. Ce pont entre les deux acteurs, en revanche, est un écho aux débuts de Peter Sellers, dont on sait qu'il fut, dans ses débuts, un second rôle auprès d'Alec Guinness lui-même, alors que celui-ci régnait sur la comédie à l'anglaise.


 

mercredi 17 mars 2021

L'Esprit s'amuse (Blithe Spirit de D. Lean, 1945)

 


Première comédie de David Lean (qui n'est pas le genre, il faut bien dire, dans lequel il s'exprimera le mieux), autour de cette histoire un peu rocambolesque, aux allures de screwball comedy à l'anglaise mâtinée de surnaturelle, avec le fantôme d’une femme qui revient enquiquiner son mari. S’il offre une variante originale du triangle amoureux, le film ne sort guère du schéma classique de la concurrence entre épouses avec le mari au mitan et le jeu comique des dialogues use et abuse de ce fantôme, uniquement vu par le mari et source de quiproquos. La fin, en revanche, est très bien vue et elle boucle joliment la boucle du scénario.
Et l’on s’amuse de voir Rex Harrison dont le rôle annonce Guêpier pour trois abeilles être en prise avec un fantôme, lui dont le rôle le plus fameux sera celui du fantôme, justement, dans l’extraordinaire Aventure de madame Muir.

 

vendredi 26 juin 2020

Vacances à Venise (Summertime de D. Lean, 1955)

 

Dans ce film charnière de David Lean (il vient se caler entre ses films anglais et ses superproductions américaines), on est emmené dans une Venise magnifique, chatoyante, douce, très romantique. Si c’est là le cadre rêvé pour la rencontre amoureuse, il en devient rapidement le seul grand intérêt du film, puisque cette rencontre reste sans aucune surprise et qu’elle est même terriblement prévisible. Le pseudo-twist final n’en est pas vraiment un et ne nous offre rien d’autre que des scènes banales d’adieux.
On est très loin des vibrations intimes et immenses de Brève rencontre, on est bien loin, aussi, de la complexité psychologique de La Fille de Ryan. Sans épaisseur psychologique, sans surprise, sans lyrisme, sans émotion, il reste du film Venise, que l’on a rarement vu filmée avec tant de charme.
Katharine Hepburn est, de son côté, fidèle à elle-même : jamais naturelle, bien peu crédible avec son jeu forcé et exagéré. Toujours associée aux mêmes rôles (ici la vieille fille toujours un peu en retard, perdue et naïve), elle n’aide pas beaucoup pour rendre crédible cette rencontre amoureuse.



jeudi 21 mai 2020

Chaussure à son pied (Hobson's Choice de D. Lean, 1954)

 

Cette comédie de meurs est arc-boutée autour de la figure bonhomme et très théâtrale de Charles Laughton, qui s'en donne à cœur joie. Même si le personnage est caricatural, son jeu comique est remarquable (il faut le voir avec ses hallucinations dues à l'alcool !). L'intrigue, en revanche, est assez simple, et l'on sait bien que le paternel, pauvre bougre alcoolique, au-delà de ses postures et de ses effets de manche, se fera mener, tout au long du film, par le bout du nez.


On retrouve néanmoins des figures féminines importantes, rappelant qu'elles parcourent bon nombre de films du réalisateur : si on a souvent glosé sur l'absence de femmes dans Lawrence d'Arabie, les femmes ont souvent la partie-belle dans ses films. C’est le cas ici où le progressisme social est clairement mis en avant (l'opposition entre les classes sociales est très marquée et revient souvent dans le jeu comique) et où les hommes sont ridiculisés.
Mais on ne retrouvera plus guère ce ton comique chez David Lean, qui quittera bientôt les petits projets anglais pour se tourner vers les grosses productions qui ont fait sa gloire.



samedi 11 mai 2019

Le Pont de la rivière Kwaï (The Bridge on the River Kwai de D. Lean, 1957)





Très célèbre film de guerre, Le Pont de la rivière Kwaï consacre David Lean et lui donne cette réputation de faiseurs de films à grands spectacles, longs, ambitieux et au succès planétaire (réputation qu’il confirmera avec l’extraordinaire Lawrence d’Arabie, puis avec le décevant DocteurJivago et perdra ensuite avec La Fille de Ryan). Cette seconde partie de carrière contraste nettement avec l’intimité anglaise de ses débuts (on pense notamment à Brève rencontre).
Lean est très à l'aise avec l'industrie hollywoodienne qui lui offre tout ce dont elle est capable : il utilise parfaitement le technicolor et le cinémascope, agence de grands mouvements d'appareils et dirige ses acteurs au cordeau, entre la star William Holden, Sessue Hayakawa qui parle anglais comme il peut et Alec Guinness, qui obtient là un rôle légendaire.


Le film, pourtant, est inégal : après une très bonne première partie – l’affrontement de Saïto et Nicholson, tous les deux engoncés dans des principes qui les rendent inflexibles –, le rythme faiblit et il ne repartira réellement que dans la célèbre séquence finale. C’est que, à partir du moment où Nicholson a vaincu Saïto et que Shears s’est échappé du camp, le spectateur tourne un peu en rond. Nicholson reprend les choses en main tandis Saïto se liquéfie et disparaît du champ. On comprend très vite à quelles contradictions vont mener les belles intentions – emplies d’honneur et de principes – du colonel. Et les séquences où Shears s’évade et doit être convaincu de s’embarquer dans l’opération commando sont trop en rupture avec la tension et le ton général de la première partie du film.

Si le rôle consacrera Alec Guinness (que l’on trouve pourtant plus convaincant dans les comédies de ses débuts (1)), on préférera sans doute le charisme de William Holden, qui manque au camp après son évasion, et dont le cynisme désabusé fait mouche.
La fin en revanche est une très belle séquence d’action avec le pont miné, le niveau de l’eau qui a baissé au matin, le combat final et l’image fameuse d’Alec Guinness qui s’affaisse sur le détonateur.


Le film, cependant, s’apparente à un simple film d’action, dans le sens où Lean n’a guère de propos sur la guerre. La folie et la cruauté des hommes, les principes comme raisons vitales, l’honneur d’un soldat au milieu de la honte d’une reddition, cela est assez convenu et ne semble intéresser Lean qu’à demi. On est loin, aussi, d’un regard sur un univers. Ici le camp de prisonnier ou la jungle auraient pu être traités à la fois comme toile de fond et comme centre du récit (comme Lean le fera avec le désert dans Lawrence d’Arabie).



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(1) : On s'amuse de voir Alec Guinness être devenu si célèbre d'abord pour son interprétation du colonel Nicholson et ensuite pour son rôle d'Obi-Wan Kenobi dans Star Wars, alors que c’est dans les comédies anglaises qu'il a pu donner la pleine mesure de son talent. On pense à Noblesse oblige ou Tueurs de dames où ses compositions sont autrement plus abouties et complexes.

vendredi 3 août 2018

La Fille de Ryan (Ryan's Daughter de D. Lean, 1970)




Beau film de David Lean qui alterne des séquences magnifiques – où le lyrisme de Lean aussi bien que sa finesse jouent à plein – avec d’autres moments où le liant du film se perd un peu.
Dans cette variation libre et lointaine de Madame Bovary – dont l’argument sert l’histoire au cœur du récit – viennent se greffer les tensions entre séparatistes irlandais et la garnison anglaise. Mais dans ce long film, c’est un peu comme si l’alchimie ne se faisait pas complétement et que les différents récits ne s’assemblaient pas parfaitement. Certains moments du récit apparaissent en retrait par rapport aux autres.

Rosy aspire à l’ascension sociale autant qu’à un ailleurs qui lui semble interdit, coincée comme elle est dans ce petit village, au bord de l’océan, entre plages et falaises. Elle se rabat, aveuglée par ses chimères enfantines, sur le maître d’école avant de succomber, violemment, devant le major Doryan, l’anglais. C’est ainsi que le récit croise les amours interdits de Rosy avec les conflits entre Anglais et Irlandais.



Certaines séquences sont très belles : les premières scènes entre Rosy et Charles Shaughnessy ; les plans subjectifs de Charles sur la plage qui comprend la tromperie de sa femme ; l’écrin de Nature construit autour de Rosy et du major ; mais aussi, dans un style aux antipodes, l’étonnante séquence de l’orage où les indépendantistes récupèrent une cargaison d’armes et, enfin, de façon générale, la magie ensorcelante des paysages filmés avec une profondeur de champ infinie.

Le film souffre sans doute d’un casting contrasté : Sarah Miles est une Rosy très touchante, tantôt rêveuse, tantôt détestable, avec cette folie de liberté qui passe dans ses yeux, Robert Mitchum, dans un rôle étonnant de maître d’école casanier, est admirable, de même que Trévor Howard, très sobre. Mais Christopher Jones est bien effacé en major marqué par la guerre et John Mills cabotine terriblement en idiot du village.


On est touché aussi par la rencontre amoureuse entre Rosy et le major, filmée comme une fulgurance au milieu d’un film très long : on sait que David Lean a consacré un film entier à la construction d’un amour improbable et irrésistible (l’admirable Brève rencontre), on comprend qu’ici une séquence suffise, cristallisant en un instant les douleurs du major, la compréhension de Rosy et cette façon dont l’un et l’autre se répondent.




samedi 23 avril 2016

Lawrence d'Arabie (Lawrence of Arabia de D. Lean, 1962)




Magnifique chef-d’œuvre, Lawrence d'Arabie agrippe le spectateur et ne le lâche plus durant plus de 3 heures, l'emportant au cœur du désert, au milieu des tribus arabes, des colonnes anglaises, des tragédies et des espoirs.
Reprenant à son compte l'histoire de Lawrence qui prit fait et cause pour les tribus arabes, David Lean ne cherche pas à coller à la réalité historique mais à construire un personnage complexe et ambigu qu’il élève au rang d’un héros tragique aux espoirs déçus. Peter O'Toole tient le rôle de sa vie, bien entouré par une multitude de seconds rôles brillants, d’Anthony Quayle à Omar Sharif, en passant par Alec Guinness ou Anthony Quinn (et sa magnifique répartie « because this is my pleasure ! » avec laquelle saura jouer Lawrence). David Lean cherche à filmer avec une certaine sobriété la splendeur du désert, qu’il laisse voir sans artifice, dans sa majesté, aux spectateurs. Certaines séquences sont éblouissantes, grandioses et inoubliables.


Le film rappelle aussi ce que peut être une superproduction : un grand réalisateur, un scénariste intelligent, des acteurs à l'avenant, un compositeur qui signe une partition légendaire, une pluie de dollars : on peut obtenir un film pompeux et tout à fait quelconque, qui aligne les ingrédients du succès sans en mélanger réellement aucun ; ou bien l'alchimie peut prendre et un chef-d’œuvre peut naître. Ainsi Lawrence d'Arabie.
Lorsque l'on débat de savoir si on peut découvrir le cinéma ailleurs que devant le grand écran d'une salle obscure, on se dit que, certainement, pour Lawrence d'Arabie, avec cette façon qu’il a d'emmener au cœur du désert, pour cet élan grandiose qu’il communique, la question ne se pose pas.


mardi 8 décembre 2015

Brève rencontre (Brief Encounter de D. Lean, 1945)



Brève rencontre David Lean Trevor Howard Poster Affiche

Très beau film intimiste et touchant, déchirant même, avec peu de moyens et de très bons acteurs. Il faut reconnaître que ce film méconnu du réalisateur dénote, à côté de ses fresques célébrissimes. Ici les images distillent une intimité triste et contenue. Les conditions de tournage ont nécessité de s'éloigner de Londres pour plusieurs scènes : la gare utilisée est celle de Carnforth, dans le nord de l'Angleterre, même si la plupart des scènes (à l'intérieur de la gare notamment) ont pu être tournées aux portes de Londres, aux studios de Denham.
Avant le lyrisme de ses films les plus connus, Lean filme l’intimité de ses personnages et cherche à capter – à coups de mouvements de caméra discrets, de petits zooms – leurs ressentis, leurs émotions naissantes. Le film se cantonne à des lieux familiers, sans âme même, des lieux de la grisaille quotidienne, des lieux où on ne s’attarde pas. Le lieu clef autour duquel tourne l'intrigue est un petit buffet de gare insignifiant dans lequel les voyageurs prennent un verre en attendant le train. Le film est d'ailleurs issu d'une pièce de théâtre qui cantonnait toutes ses scènes à ce buffet de gare. On est bien loin de l'exotisme des déserts de l'Arabie, de la jungle birmane ou de la neige de Russie !
Les lieux de l'action sont familiers et quelconques parce que l'histoire se veut banale, dans le sens où elle peut arriver à tout le monde, n'importe quand. C'est là l'essentiel du propos de Lean qui s'applique à prendre comme personnages principaux un homme et une femme rangés, chacun marié, chacun avec des enfants. Même si la routine installée dans leurs vies les laisse insatisfaits et, par là même – quoique de façon inconsciente au départ – disponibles. C’est cette disponibilité chez l’autre qu’ils ressentent.
Et, dans ces lieux familiers, Lean filme le grain de sable qui s’immisce, qui s'amplifie et qui emporte tout. Jusqu’au vertige absolu. Vertige filmé par des plans débullés qui viennent accompagner Laura titubante au bord du quai.
Célia Johnson Brève rencontre David Lean Trévor Howard

L’interprétation des deux acteurs est remarquable, tout en retenue. Celia Johnson, avec ses grands yeux perdus et tristes, est bouleversante. La musique puissante de Rachmaninov, très utilisée, vient exhausser les ressentis des personnages. Et le drame confine au tragique avant d'acter la rupture et de permettre à la vie de reprendre son cours normal (avec l’intervention finale du mari de Laura).
Il est difficile de ne pas penser à La Fille de Ryan qui traite aussi d'un coup de foudre, interdit lui aussi mais pour des raisons plus complexes encore. En effet le coup de foudre immédiat entre Rosy et l’officier y est traité de façon complètement lyrique – lyrisme absent dans Brève rencontre. C’est intéressant de penser que Lean, qui a déjà consacré tout un film à traiter de la naissance de l'amour et de son surgissement lent, le reprend dans La Fille de Ryan en une seule séquence et choisit de le poser d’emblée, comme quelque chose d’insubmersible, avec une attirance indiscutée et inexorable entre Rosy et le major.
Récemment, C. Eastwood, dans Sur la route de Madison, sans reprendre la trame de Brève rencontre, en reprend le thème : une simple rencontre où, peu à peu, tout se joue.

mardi 7 juillet 2015

Docteur Jivago (Doctor Zhivago de D. Lean, 1965)




Malgré son grand succès, c’est une adaptation décevante de David Lean. On aura bien du mal à trouver, dans ce mélodrame ambitieux, un écho à la poésie du roman de Pasternak, de même qu’on aura bien du mal à retrouver la majesté et le lyrisme de Lawrence d’Arabie dans cette superproduction. La seconde partie du film, notamment, qui se veut plus romantique, est moins réussie que la première, qui aborde les bouleversements politiques de la Russie.
Si les moyens sont là, la magie n’opère guère et les paysages enneigés, les maisons envahies de glace, le romantisme, tout cela sonne assez faux, quelques bonnes scènes ne parvenant pas réellement à sauver le film.