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lundi 21 août 2023

HHhH (C. Jimenez, 2017)





Biopic faiblard de Cédric Jimenez, qui, très vite, se bonifiera dans ses réalisations ultérieures. Mais, ici, il tombe dans le travers de nombreux films retraçant la vie d’un personnage : l’ensemble ressemble à une fiche biographique dont on a surligné quelques moments forts ou célèbres et que le film met en image.
On voit ainsi Heydrich réagissant à telle ou telle frustration, tantôt amant aimant, tantôt mari violent, tantôt encore père jouant avec ses enfants. Jimenez, bien entendu, nous le montre aussi donnant ses directives à la conférence de Wannssee ou chapeautant inflexiblement des Einsatzgruppen.
Si le film suit aussi la trajectoire des deux résistants qui iront jusqu’à son assassinat, cet aspect du film est moins passionnant, il faut bien dire, que de suivre un monstre dont on s’attendrait à ce que le film nous dise quelque chose. Mais HHhH, in fine, n’explore pas grand-chose de ce que fut Heydrich, c’est-à-dire – hélas – bien plus qu’un monstre froid : il fut un concepteur efficace et zélé, maillon essentiel qui a permis à l’Allemagne d’Hitler de franchir plusieurs étapes conduisant à la solution finale en 1941-1942.
Mais on ne rentre pas un instant dans la tête du personnage. Heydrich, terrifiant monstre dans une époque qui n’en a pas manqué, aurait pu être scruté de beaucoup plus près. Ou alors on aurait pu voir la caméra buter à la barrière de son crâne, incapable de sonder ce qu’il y avait derrière et qui produisait autant d’inhumanité. On aurait eu là un geste cinématographique fort. Mais ce HHhH décevant nous dit simplement qu’Heydrich était monstrueux. Certes. Est-ce là tout le propos ? Y avait-il besoin d’un film pour le dire ?
Il faut reconnaître aussi que le film est desservi par Jason Clarke dont l’interprétation est tout à fait creuse et sans âme. On a du mal à comprendre le choix de l’acteur, à la morphologie peu ressemblante (ce qui pose problème puisque justement le film ne va guère plus loin que l'apparence) et tout à fait incapable d’épaissir son personnage. L’acteur Stephen Graham qui campe Himmler – que l’on voit finalement assez peu (1) –, est beaucoup plus convaincant. Et l’on se souvient, à titre de comparaison, de l’interprétation hallucinée de Bruno Ganz (qui est bien sûr un acteur d'un tout autre calibre) en Hitler dans La Chute de Hirschbiegel.



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(1) : Le titre HHhH signifie « Himmlers Hirn heiβt Heydrich »  que l'on peut traduire par « le cerveau de Himmler s'appelle Heydrich ».

 


vendredi 18 novembre 2022

Novembre (C. Jimenez, 2022)

 



Cédric Jimenez, décidément toujours influencé par le cinéma outre-Atlantique, entreprend avec Novembre une démarche très américaine en se saisissant d’un traumatisme qui a bouleversé la France.
C’est que le cinéma américain a – depuis toujours et parce qu’il est le médium qui a pris en charge le récit de la Nation – très rapidement parlé des différents traumas que la société a pu subir. Le cinéma français n’a pas ce même rôle et son rapport à l’actualité de la société est très variable. On sait, par exemple, que les films français sur la guerre d’Algérie, s’ils existent, sont assez peu nombreux, et encore plus rares sont ceux qui abordent les sujets les plus polémiques (les tortures, les injustices, etc.). Il a donc fallu sept ans pour que le cinéma français se saisisse du traumatisme des attentats de novembre 2014 (c'est le second film sur le sujet, après Revoir Paris) et l’on peut voir dans ce film l’équivalent, par exemple, de Vol 93 de Paul Greengrass.


Novembre
, alors, a le bon goût d’éviter de montrer les attentats directement (il n’y a qu’une seule séquence où des victimes sont interrogées à l’hôpital) pour se concentrer sur les premiers pas de l’enquête. Cherchant à dépasser aussitôt la sidération, les services de police foncent tous azimuts, cherchent, s’égarent, repartent dans une autre direction, doutent, suivent une piste improbable et, finalement, parviennent à avancer. L’ensemble est réussi et trouve dans l’assaut contre l’appartement de l’organisateur des attentats un climax efficace.
La présence du très populaire Jean Dujardin en patron des services anti-terroristes est importante puisque son personnage prend en main, à l’écran, la mobilisation pour contrer le terrorisme. S’il retrouve là un rôle très proche de celui qu’il tenait dans La French (avec déjà Jimenez aux commandes), sa présence participe de l’appropriation par le spectateur des attentats, beaucoup plus que si son personnage avait été tenu par un acteur inconnu ou de second rang.



mardi 22 février 2022

Bac Nord (C. Jimenez, 2021)

 



Construit en deux parties, Bac Nord démarre parfaitement en forme de film d’action rythmé qui se veut immersif et très américain dans l’idée. Cédric Jimenez plonge le spectateur dans le quotidien de  policiers embourbés dans la lutte contre le trafic de drogue dans les cités. Le film cherche à épaissir ses personnages dans des scènes assez convenues (le barbecue du dimanche) ou à montrer les conflits avec leur hiérarchie mais on sent bien que ce n’est pas le cœur du film qui préfère la frénésie de la caméra qui court après les protagonistes lors d’actions chocs ou de rapports de force violents au cœur de quartiers filmés comme des zones de guerre.
La seconde partie, construite autour de la mise en accusation des mêmes policiers, est, quant à elle, moins prenante et tourne un peu à vide – surtout que le réalisateur, se focalisant sur les personnages, laisse volontiers de côté le pourquoi du comment.

Un point fort du film, au-delà du rythme de la première heure, est l’interprétation, en particulier celle de Gilles Lelouche, très quelconque en parrain mafieux dans La French (le polar précédent de Jimenez), mais ici très convaincant en policier à la fois usé et agressif.

Le film, bien entendu, prend une dimension politique inévitable, en montrant sous un jour nouveau et sans grande concession les cités prises dans la poigne de fer des gangs de la drogue. On comprend les débats qu’il provoque. On est bien loin de la vision des Misérables qui, lui, politiquement, était adoubé, mais qui prétendait, par un tour de passe-passe étonnant, décrire la vie des cités sans jamais évoquer le problème de la drogue. On est ici davantage du côté de Deephan (qui était très décevant) et de Ma 6-T va crack-er (mais vu du point de vue des policiers et avec un récit et des personnages autrement plus convaincants).




 

samedi 5 février 2022

La French (C. Jimenez, 2014)

 



Même si l’on retrouve avec plaisir un polar à la française qui se projette dans les années 70 (un peu comme le faisait Mesrine) et même si cette plongée dans le milieu est réussie, l’on reste un peu sur notre faim, tant le film reste dans des sentiers conventionnels. Les relations entre parrain et sous-fifres, les écueils rencontrés par le juge, les personnages, les opérations de police, tout cela est déjà vu et revu, sans guère de surprises, de rythme ou de style particuliers.
Le personnage du juge rappelle un peu celui du juge Fayard, mais aussi celui du flic joué par Al Pacino dans Heat, sûr de lui et toujours à cent à l’heure, avec cette volonté de brusquer le monde autour de lui et d’entrer dans une pièce en brusquant les routines pépères des flics.

Mais le film pâtit d'un casting décevant. Jean Dujardin, s’il abandonne ses rôles excentriques au second degré, devient tout à coup bien terne et très quelconque. Il faudra attendre la sobriété de son jeu dans J’accuse pour le trouver convaincant en dehors de son registre habituel. Gilles Lelouche, en parrain mafieux, n’est pas non plus convaincant (l’acteur retrouvera Jimenez dans Bac Nord pour une composition cette fois remarquable). Il semble que jouer un parrain mafieux français ne soit pas facile (on pense à la piètre prestation de Kad Merah dans Immortel). On est loin de Fernando Rey dans French connection.