Très grand film noir réalisé par un des très grands
maîtres du genre, Cris Cross (1) suit
les codes habituels du genre et, comme tous les grands films de genre, le
transcende par des apports originaux ou uniques.
On retrouve alors les éléments que maîtrise parfaitement Robert
Siodmak (et vus, par exemple, dans Les Tueurs) : une photo magnifique, un personnage principal (Burt Lancaster,
parfait comme toujours) enfermé dans un destin implacable, une femme fatale toute
de fausseté, un monde de gangsters qui sont autant de petites frappes.
Si Siodmak maitrise à la perfection ces codes il
construit, par-dessus ces éléments, une atmosphère étrange, onirique, comme
détachée du monde. Les personnages – et notamment Thompson –, prisonniers de
leur passé, semblent errer sans espoir dans un univers déconnecté de la réalité
du présent. Cette sensation vient à la fois de l’assemblage de plans larges et moyens de Siodmak, qui
rejette les personnages loin les uns des autres ; de la musique
lancinante ; de la photo qui découpe le cadre
étrangement autour des personnages, les isolant dans un univers détaché et
lointain ou d’une profondeur de champ qui étire les décors à n’en plus finir.
Siodmak, habilement, construit son intrigue à coup de
flash-backs (là aussi comme dans Les
Tueurs) et complexifie progressivement ses personnages. Thompson, obsédé
dans son amour, sait parfaitement qu’il n’échappera pas à son destin, mais,
comme pour les grandes figures du genre, fonce tête baissée.
La séquence du casse, enfin, est magistrale et le final est
un aboutissement parfait et inéluctable.
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(1) : On préférera le titre d’origine, tellement plus
évocateur que la platitude de « Pour
toi j’ai tué ».
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