mercredi 8 octobre 2014

Il était une fois en Anatolie (Bir Zamanlar Anadolu'da de N. B. Ceylan, 2011)




Film très beau, très sombre, qui, derrière un récit d’allure simple (des routes d’Anatolie arpentées par des policiers un soir d’orage), fait exploser peu à peu des vérités cachées, au fil des discussions et des moments passés ensemble par ce groupe d’hommes.

Le cadavre recherché n’est pas l’essentiel, les vrais drames sont laissés hors champ, mais ils sont révélés au fur et à mesure, et les connections se font chez le spectateur en même temps qu’elles se font pour les personnages.
La nuit est propice à des révélations – qui ne sont pas des moments fracassants qui laissent sans voix, mais des mots qui s’agrègent les uns aux autres et dont sortent des significations. La nuit est propice aux longues réflexions, la nuit est propice aussi, évidemment, au surgissement de fantômes du passé.
Drame de Kenan qui a tué et qui doit indiquer où il a enterré le cadavre, drame du procureur, beaucoup plus profond et qui émerge progressivement concernant la mort de sa femme. Drame du médecin qui est celle d’une vie finie, achevée. Après avoir été effleuré par la grâce, le jour se lève sur cette tristesse, cette vie déjà terminée.
Et, au milieu de ces drames profonds, de cette ambiance d’hommes et de la recherche sordide qui n’en finit pas, surgit une lumière inouïe, un moment de grâce, quand la fille du maire vient servir le thé.


Ceylan parvient à mêler ces drames immenses et profonds à des soucis du quotidien beaucoup plus triviaux, quelconques (un problème de prostate dont on rit, des histoires de yaourt, de melon, de vie communale, d’administration locale) : ce grand écart est avalé avec fluidité et les personnages acquièrent alors une grande épaisseur humaine et, par là même, un universalisme. Ce ne sont plus seulement des petits soucis qui se déroulent une nuit quelque part le long des routes d’Anatolie, mais des drames humains universels et insolubles.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire