jeudi 25 septembre 2014

Furie (Fury de F. Lang, 1936)




Exceptionnel film de Fritz Lang qui, pour son premier film américain, tire à boulets rouges sur la société qui l'accueille. Alors qu’il fuit l’Allemagne nazie, sa charge est très lourde contre l’Amérique.
Le film est remarquable par la double trame qu'il propose. Lang montre comment la population, influencée par les on-dit et prise en otage par son émotion (il est question du meurtre d'une fillette), peut déborder de haine destructrice. Pour Lang le constat est accablant. Le pauvre Joe Wilson (très bon Spencer Tracy) a le tort d’être au mauvais endroit au mauvais moment et sa bonhomie décontractée tombe en lambeau face à la déferlante qui se déchaîne contre lui.


 

Mais ensuite, après l’attaque de la prison et de la disparition de Joe, c'est un second film qui commence. Car Joe ourdit sa vengeance. Le procès équitable – et justifié – des lyncheurs en devient inéquitable du fait de Joe qui veut aller au bout de sa vengeance. Le procès intenté à ceux qui ont refusé un procès à Joe devient lui-même perverti par une fausse preuve qui accable les accusés. La transformation de Joe, qui s’enferme dans sa haine et sa souffrance, est remarquablement traitée.
Si la fin est optimiste, le spectateur prend de plein fouet le grand thème langien de la culpabilité : nul n’est innocent nous dit Lang. Même Joe, au départ simple victime mais qui devient, progressivement, ivre de vengeance.



On remarquera que les images projetées lors du procès sont autant de preuves de la culpabilité des accusés. La vérité présentée par les images est donc ici présentée comme indiscutable. Mais, dans la réalité, ce n’est pas toujours aussi simple. C'est ainsi que le fameux film de Zapruder, qui aurait pu être une preuve par l'image, ne permet pas de comprendre clairement le déroulement de l'assassinat de Kennedy.

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