Exceptionnel film de Fritz Lang qui, pour son premier
film américain, tire à boulets rouges sur la société qui l'accueille. Alors
qu’il fuit l’Allemagne nazie, sa charge est très lourde contre l’Amérique.
Le film est remarquable par la double trame
qu'il propose. Lang montre comment la population, influencée par les on-dit et prise
en otage par son émotion (il est question du meurtre d'une fillette), peut
déborder de haine destructrice. Pour Lang le constat est accablant. Le pauvre
Joe Wilson (très bon Spencer Tracy) a le tort d’être au mauvais endroit au
mauvais moment et sa bonhomie décontractée tombe en lambeau face à la
déferlante qui se déchaîne contre lui.
Mais ensuite, après l’attaque de la prison et
de la disparition de Joe, c'est un second film qui commence. Car Joe ourdit sa vengeance.
Le procès équitable – et justifié – des lyncheurs en devient inéquitable du fait de Joe qui veut aller au bout de sa vengeance. Le procès intenté à ceux qui ont
refusé un procès à Joe devient lui-même perverti par une fausse preuve qui
accable les accusés. La transformation de Joe, qui s’enferme dans sa haine et
sa souffrance, est remarquablement traitée.
Si la fin est optimiste, le spectateur prend
de plein fouet le grand thème langien de la culpabilité : nul n’est
innocent nous dit Lang. Même Joe, au départ simple victime mais qui devient,
progressivement, ivre de vengeance.
On remarquera que les images projetées lors du procès sont
autant de preuves de la culpabilité des accusés. La vérité présentée par les images est donc ici
présentée comme indiscutable. Mais, dans la réalité, ce n’est pas
toujours aussi simple. C'est ainsi que le fameux film de Zapruder, qui aurait pu être une preuve par l'image, ne permet pas de comprendre clairement le déroulement de l'assassinat de Kennedy.
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