mercredi 26 novembre 2014

Les Amants crucifiés (Chikamatsu monogatari de K. Mizoguchi, 1954)




Ce chef-d’œuvre de Mizoguchi nous emmène, une nouvelle fois, dans un Japon féodal qui nous est en tout point étranger. On tient là le dernier des quatre chefs-d’œuvre que Mizoguchi a réalisés, coup sur coup, en deux années.
Et, comme pour les plus grandes œuvres, cette singularité (un autre temps, un autre lieu, d’autres mœurs, d’autres rapports entre les gens) est balayée et le film touche et émeut par son universalisme.
Le chemin tragique des deux amants, qui vient marcher sur les plates-bandes rigides de cette société d’un autre temps, est à la fois un hymne à la liberté et une destinée que leur amour rend inévitable. Mais cet amour est tel que le carcan de la société devient illusoire et secondaire : la sérénité finale affichée par Mohei et Osan est bouleversante.


Ce film est un exemple de ce que l’art peut s’adresser à nous, spectateurs, qu’il s’agisse de l’expression ultime d’une culture identique à la nôtre ou en tout point différente. On touche alors du doigt, dans cet universalisme étourdissant, la réelle transgression de l’art : il s’agit non pas de transgresser les règles ou les habitudes d’une culture, mais bien de parvenir à s’adresser à un Autre, lointain et étranger. C’est en cela que Mizoguchi est un artiste infiniment transgressif et Les Amants crucifiés une œuvre infiniment bouleversante.

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