Ce chef-d’œuvre de
Mizoguchi nous emmène, une nouvelle fois, dans un Japon féodal qui nous est en tout
point étranger. On tient là le dernier des quatre chefs-d’œuvre que Mizoguchi a
réalisés, coup sur coup, en deux années.
Et, comme pour les
plus grandes œuvres, cette singularité (un autre temps, un autre lieu, d’autres
mœurs, d’autres rapports entre les gens) est balayée et le film touche et émeut
par son universalisme.
Le chemin
tragique des deux amants, qui vient marcher sur les plates-bandes rigides de
cette société d’un autre temps, est à la fois un hymne à la liberté et une
destinée que leur amour rend inévitable. Mais cet amour est tel que le carcan
de la société devient illusoire et secondaire : la sérénité finale
affichée par Mohei et Osan est bouleversante.
Ce film est un
exemple de ce que l’art peut s’adresser à nous, spectateurs, qu’il s’agisse de l’expression
ultime d’une culture identique à la nôtre ou en tout point différente. On
touche alors du doigt, dans cet universalisme étourdissant, la réelle
transgression de l’art : il s’agit non pas de transgresser les règles ou les
habitudes d’une culture, mais bien de parvenir à s’adresser à un Autre, lointain
et étranger. C’est en cela que Mizoguchi est un artiste infiniment transgressif
et Les Amants crucifiés une œuvre infiniment
bouleversante.
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