Excellent film d’atmosphère de
Clouzot, qui s’appuie sur une imprégnation sociale forte de chaque lieu où il
promène ses personnages (les coulisses d’un théâtre, les locaux de la PJ, etc.)
et sur des comédiens exceptionnels (quelle partition de Jouvet !). Cet
attachement du réalisateur à recréer des ambiances et, par-là même, à faire du
film une étude de mœurs, met presqu’au second plan la résolution de l’énigme
policière. D’ailleurs le scénario est habile : la focalisation n’est pas
fixe, et l’on épouse tantôt le regard de Maurice (excellent Bernard Blier),
tantôt celui de sa femme ou de l’amie de sa femme, tantôt celle de l’inspecteur
Antoine (Jouvet). Ces changements de focalisation dédramatisent l’opposition
policier-coupable, et accentuent le bain social réaliste du film. Il n’y a
guère que le regard du meurtrier que, en fait, le film n’épouse pas.
C’est que Clouzot ne nous invite pas
à choisir entre le(s) présumé(s) coupable(s) et le policier, tous ont une part
de sympathie et d’humanité qui les rend proches du spectateur, malgré leurs
travers. De même, malgré un cynisme et une noirceur indéniable, Clouzot laisse
quelques espoirs au spectateur (l’amour triomphe, sans que l’on ressente une
artificielle happy-end).
Les deux seuls personnages qui,
manifestement, n’ont pas la sympathie du réalisateur, sont finalement la
victime… et le coupable !
On tient là un des chefs-d’œuvre incontestables
du film noir à la française.
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