Le célèbre plan final de La Prisonnière du désert de Ford |
Les réalisateurs
de films sont toujours des passionnés de cinéma (et beaucoup, en outre, ont fait
des études de cinéma). Dès lors, ils ont tous été et sont encore influencés par
des films qu’ils ont pu voir, qui les ont marqués ou passionnés. On comprend donc
qu’il n’y a pas de films « purs », c’est-à-dire que tous les films
portent en eux une influence venant d’autres films. Cette influence est plus ou
moins nette et plus ou moins marquée volontairement par le réalisateur.
Bien entendu un
film ne laissera pas forcément transparaître toutes les influences ou toutes
les préférences d’un réalisateur. On sait que Tobe Hooper, très cinéphile,
adore Chantons sous la pluie, mais on
serait bien en peine d’en trouver la trace dans Massacre à la tronçonneuse !
Le cas des
remakes est particulier en ce sens que, plus qu’une influence, il s’agit d’une
reprise, parfois presque plan par plan (par exemple Psycho de Van Sant). Le plus souvent le film s’éloigne de
l’original et propose une transposition qui prend plus ou moins de liberté avec
l’original (on pense à Obsession de
De Palma, qui est une reprise de Vertigo ou Hardcore de Schrader qui revisite,
en le transposant aux années 70, La Prisonnière du désert). Parfois le film ne garde de l’original qu’un thème
central, comme le fait Santa Sangre
de Jodorowsky à partir, là aussi, de Psychose.
Mais, mis à part
le cas des remakes, les liens entre films peuvent se manifester de différentes
façons. On peut donc voir dans un film :
- des citations directes
d’un autre film : dans Gremlins
de Joe Dante, les personnages regardent La Vie est belle à la télé ; dans L’Armée des 12 singes, le héros va voir Vertigo
au cinéma ; dans Prima della rivoluzione, de Bertolucci, Fabrizio conseille à Agostino d'aller voir La Rivière Rouge, dans Yoyo de Etaix, on peut voir des affiches de La Strada, etc.
- la reprise d’une scène, d’une réplique, d’une position de caméra, d’un thème bien précis, d’un décor, d’un lieu, d’un vêtement, etc. : le pantalon jaune rayé de noir que porte Uma Thurman dans Kill Bill est le même que celui de Bruce Lee porté dans Opération dragon ; le R2D2 de Star Wars vient tout droit de Silent Running ; la fumerie d’opium dans laquelle se réfugie Noodles dans Il était une fois en Amérique évoque celle où finit Miss Miller dans John McCabe ; la séquence qui lance Tout sur ma mère est une reprise de celle d'Opening Night, etc.
La Vie est belle, vu à la télé dans Gremlins |
- la reprise d’une scène, d’une réplique, d’une position de caméra, d’un thème bien précis, d’un décor, d’un lieu, d’un vêtement, etc. : le pantalon jaune rayé de noir que porte Uma Thurman dans Kill Bill est le même que celui de Bruce Lee porté dans Opération dragon ; le R2D2 de Star Wars vient tout droit de Silent Running ; la fumerie d’opium dans laquelle se réfugie Noodles dans Il était une fois en Amérique évoque celle où finit Miss Miller dans John McCabe ; la séquence qui lance Tout sur ma mère est une reprise de celle d'Opening Night, etc.
L’influence peut parfois être évidemment plus profonde que ces quelques éléments qui viennent
agrémenter un film.
- Il peut s’agir
d’une reprise du style d’un réalisateur : la stylisation parfois extrême
de Tarantino doit beaucoup à celle de Sergio Leone ; la mise en scène
tarte à la crème des scènes d’action contemporaines (éclaboussure de sang,
ralentis) doit tout à Sam Peckinpah.
La Horde sauvage de Peckinpah |
- Certains films
ou certains courants du cinéma ont eu une influence considérable qu’il est de
fait difficile d’éviter. Sans remonter jusqu’à Griffith qui a commencé à
installer les règles de narration et de montage, on peut citer l’influence du
cinéma expressionniste allemand sur le cinéma américain (à tel point qu’il y a
eu beaucoup plus de films américains expressionnistes que de films allemands)
ou encore celle de la Nouvelle vague sur le Nouvel Hollywood (Alain Resnais par
exemple).
Un plan expressionniste dans La Nuit du chasseur de Laughton |
- Quand
Montgomery Clift, coincé sur sa barque au milieu du lac dans Une place au soleil hésite à frapper et
noyer sa femme, on pense évidemment à L’Aurore
de Murnau. Mais, bien plus que la simple reprise de la scène, c’est la même
hésitation terrible qui l’assaille, la même énormité de ce qu’il va commettre
qui déferle sur lui. C’est, dès lors, la même impossibilité pour lui de
commettre l’acte.
Aurore de Murnau |
La même séquence, reprise dans Une place au soleil |
- Dans Voyage au bout de l’enfer, Cimino
reprend des thèmes chers à John Ford : il réfléchit à la communauté, à ce
qui la soude, à ce qui la brise. Le film reprend des motifs de Qu’elle était verte ma vallée et s’il
cite le film clairement (l’aciérie du début doit beaucoup à la vallée
industrielle de Ford ; il reprend un jeu précis lors d’une scène de fête)
ce sont les thèmes du film eux-mêmes qui sont re-traités par Cimino.
- Dans American sniper, Eastwood reprend un
autre thème fordien : celui du traitement du héros, qui est dans la
réalité toujours loin de ce qu’en rapporte la légende. Il reprend donc les
développements de Ford de L’Homme qui tua Liberty Valence et donne son avis sur ce thème.
C’est évidemment dans ce dernier cas que le cinéma est fascinant : quand il est le jeu d’un dialogue d’un film à l’autre où des positions sont exprimées. Bien entendu, au-delà des opinions, c’est leur expression qui est fascinante : comment Ford exprime le mensonge qui se cache derrière la légende, quelles images choisit Eastwood en fin de film.
C’est évidemment dans ce dernier cas que le cinéma est fascinant : quand il est le jeu d’un dialogue d’un film à l’autre où des positions sont exprimées. Bien entendu, au-delà des opinions, c’est leur expression qui est fascinante : comment Ford exprime le mensonge qui se cache derrière la légende, quelles images choisit Eastwood en fin de film.
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