Intéressant film
de Michelangelo Antonioni, qui tourne sa vision personnelle du changement de
vie : David Locke (Jack Nicholson), journaliste à la vie vaine et
médiocre, a l’opportunité de changer d’identité. Il a alors l’occasion de
renaître, dans la vie d’un autre.
Mais Antonioni
ne joue pas le même jeu que d’autres avant lui (on pense à La Vie d’un honnête homme de S. Guitry,
ou à Seconds de J. Frankenheimer) :
ici l’homme médiocre ne prend pas une identité exceptionnelle. Locke passe
d’une vie morne à une autre vie morne, saute d’une vie sans éclat à une autre
vie sans éclat. Le film, alors, de même que de nombreux films sur ce thème (Seconds encore), devient bien sombre et
pessimiste : changer d’identité ne résout rien.
Le style
d’Antonioni, si particulier, épouse parfaitement le propos, et, bien plus, il
devient le cœur même du propos : construites autour du vide, de l’absence
et de la solitude, les séquences peu à peu étouffent le personnage, qui est
comme coupé de toute relation avec autrui. Ces plans fixes, ces mouvements
lents de caméra, ces panoramiques qui partent de Locke et reviennent à lui
aliènent progressivement le personnage, quelle que soit son identité.
L’arrivée de la
fille (Maria Schneider) constitue bien une respiration, pour Locke autant que
pour le spectateur, mais elle aussi est solitaire et sa présence, finalement,
ne relance pas la vie de Locke.
L’exceptionnel plan séquence qui clôt le film est un résumé remarquable du style d’Antonioni : la solitude du personnage et sa mort sont filmées avec une grande application formelle, en montrant très peu, en tournant autour, littéralement, de l’action et en laissant hors-champ, finalement, l’essentiel.
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