mardi 20 novembre 2012

King Kong (E. Schoedsack et M. C. Cooper, 1933)




Film légendaire au succès colossal, King Kong est un des premiers mythes entièrement cinématographiques (non issu de la littérature, à la différence de Dracula, Frankenstein ou encore Tarzan) et qui a eu une influence considérable. Le film marque par ses trucages, son exotisme aventurier mais aussi, bien entendu, par son érotisme puissant.
Pour ce qui est des trucages, le film propose un ensemble de techniques qui seront des grands classiques des effets visuels et qui seront utilisés pendant des décennies (jusqu’à la révolution numérique). Bien plus qu’une simple démonstration technique, ces trucages participent d’une ambiance onirique, étrange, renforcée par la très bonne photo avec des oppositions marquées de noirs et de blancs.



Bien plus qu’une version revisitée et exotique de la Belle et la Bête, le film est à la fois riche en symboles et prête à réfléchir. En premier lieu les relations entre les villageois indigènes et King Kong sont complexes. Pour les villageois King Kong est bien plus une divinité qu’une force destructrice, divinité crainte et qu’il faut apaiser (et remercier, via des sacrifices humains, de sa protection contre les véritables monstres que sont les ptérodactyles et autres dinosaures). Cette complexité des relations villageois-King Kong s’exprime au travers de la gigantesque porte qui barre l’entrée du village : si l’on comprend qu’il faille un mur infranchissable, on s’interroge sur la nécessité de faire une porte à l’échelle du monstre, alors que celui-ci n’est pas destiné à entrer dans le village. Pourquoi, dans ce cas, une porte à sa taille (Spielberg en reprendra l’image dans son Jurassic Park) ? Cette porte, qui est une frontière entre deux mondes qui s’opposent, peut être comprise en interprétant le rôle de King Kong dans l’inconscient des villageois (les monstres expriment le plus souvent des fantasmes ou des blocages inconscients individuels). Tant que l’équilibre est maintenu entre Kong et les indigènes, celui-ci ne franchit pas la porte et reste sagement « de l’autre côté ». Mais, aussitôt que la puissance du monstre est libérée, celui-ci foncera et pénétrera dans le village.



C’est que l’arrivée des aventuriers américains va détruire cet équilibre et rebattre les cartes de rôle. Car, au lieu de dévorer séance tenante la jolie blonde qui lui est sacrifiée, le gorille emporte, protège, et finalement aime celle qui était sa proie. King Kong, tout à coup, n’agit plus comme un monstre. Au contraire, King Kong est devenu une proie pour les aventuriers – et notamment Carl Denham, dépourvu du moindre sens moral et qui semble uniquement guidé par le profit. Et, le bel équilibre mis à bas, King Kong se transforme alors vraiment en force destructrice.
Ensuite, de l’île à New York cela ne change rien, il ne s’agit que du passage d’une jungle à une autre : la force destructrice continue de s'y déchaîner...

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