Film riche et très typique du style d'Arnaud Desplechin, qui explore
avec sa densité habituelle les méandres d'une famille complexe, où l'indifférence
et la haine se conjuguent et se répondent. Henri, le fils mal-aimé, le petit monstre qu'il faut haïr, schizophrène et rejeté, s'avère être le seul à être compatible pour une greffe
qui sauverait sa mère. Sa mère, terrible Junon (Catherine Deneuve), qui règne
sur son monde, froide et contrastée.
Desplechin parvient à brosser les portraits de nombreux personnages,
qui sans réellement être bien définis et bien en place (ils ont toujours autour
d'eux un halo flou étrange), s'épaississent progressivement et existent de plus en plus. Cette existence est liée à la dimension familiale qui se met en place,
autour de ce lien du sang, de ces rapports conflictuels entre la mère et les
enfants, et entre les enfants entre eux.
Desplechin parvient aussi, dans un univers très sombre et dramatique, à
insérer des touches non pas comiques mais d'une ironie sarcastique, qui donnent
à certaines séquences une allure de comédie noire. Comme si, au milieu du
malheur, on pouvait en rire.
Desplechin, enfin, innove constamment avec sa caméra, avec une certaine
discrétion mais beaucoup de variété, multipliant les plans contrastés, jouant
de l'image pour partir sur les flashs mentaux des personnages, semant le doute
sur qui se rattache à quoi. Le film est aussi émaillé de nombreuses références
(Hitchcock n'est jamais loin, ni la mythologie, ou encore Joyce (le nom même de
Dédalus évoque inévitablement Ulysse)). La densité dramatique, les multiples
apartés romanesques que se permet Desplechin (mais sans jamais rompre le rythme,
complètement maîtrisé), l'habituelle famille d'acteurs du réalisateur (Matthieu
Almaric, Emmanuelle Devos, Chiara Mastroianni, etc.) construisent un récit
foisonnant, très typé, entre intellectualisme et plaisir de raconter.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire