Excellent film
de Joseph Losey qui montre le cheminement d’une conscience qui, entièrement
tournée vers soi, de force, se met à devoir prendre conscience d’autrui. Archétype
du profiteur cynique – il rachète à bas prix les œuvres d’art de Juifs aux
abois – Robert Klein est confondu avec un homonyme juif.
La force du film
est dans le cheminement du personnage qui se trouve obligé de se tourner vers
autrui – ici le Juif – et à embrasser ses malheurs. Bien plus : il se met
à assumer cet état de Juif qu’il n’est pourtant pas. Et il comprend que ce qu’il
subit – ou ce qui le menace – ne serait pas moins odieux s’il était
réellement juif. C’est cette prise de conscient qui lui fait accepter de subir
ces violences. Et il consent à sa disparition au milieu de tous les autres,
dans la rafle du Vel’ d’Hiv.
C’est ainsi que
Joseph Losey emmène jusqu’au bout son personnage, dans une quête de son double
qui est un chemin d’inversion et de conversion étonnant, allant jusqu’à se
confondre avec autrui. Dans une ambiance glacée et noire, toute l’enquête de
Klein, toutes ses démarches ou ses visites n’aboutissent qu’à ce retournement
progressif du personnage contre lui-même, pendant que l’administration de son
côté, se retourne progressivement contre lui. Il commence à signaler ce qui est
pour lui inacceptable – être confondu avec un homonyme juif – se plaindra, se
mettra en colère puis ouvrira les yeux. Et toue la violence intérieure (que
Delon retransmet avec une espèce d’impassibilité dérangée géniale) épousera le calme
du juste quand, au Vélodrome d’Hiver, il se laisse entraîner volontiers.
Les deux
premières séquences – le monstrueux examen médical et la vente du tableau à
Monsieur Klein (auquel répondra le court dialogue final) – plante le décor de
cette France sous l’Occupation, où l’on est dépouillé de son identité (physique
ou historique) et, bien vite, de son humanité.
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