Film manifeste, L’Homme à la caméra est le chef-d’œuvre de
Dziga Vertov, celui dans lequel il parvient au summum de son esthétique du
fragment, avec l'idée d'interpréter le réel pour le spectateur. En utilisant le documentaire plutôt que la fiction, Vertov s’éloigne de
la narration (par rapport à un Eisenstein par exemple) mais il multiplie les rapprochements,
les mises en perspective, les confrontations d’images tournées çà et là, et il
les réunit ou les oppose, par des effets de montage variés (jusqu’à l’arrêt sur
image, qui fige pour un instant le flux des images), sans chercher d’unité
narrative mais en travaillant sur des associations. C'est le cas dans la séquence célèbre où un clignement d’œil en gros plan est montré en alternance
avec des persiennes qui s’ouvrent et se ferment et avec l’iris d’un objectif
photographique. L’association d’idée est puissante non pas parce que la forme est
similaire ou le mouvement d’ouverture/fermeture est identique, mais parce que c’est
le principe, le phénomène lui-même qui est ainsi retrouvé. Le montage associe donc des
thèmes.
Ou encore : plusieurs plans se succèdent d’athlètes pris sur le vif, en des endroits différents. Par l’accumulation d’images, Vertov cherche à rejoindre les modèles antiques de la statuaire grecque et à représenter l’Athlète. Il procède ainsi en quelque sorte par induction : d’un exemple particulier, qu’il multiplie, il en vient à une considération générale. Il dit ainsi, à propos de son film : « moi, ciné-œil, je crée un homme beaucoup plus parfait que celui qu’à créé Adam, je crée des milliers d’hommes différents d’après différents dessins et schémas préalables ».
Ou encore : plusieurs plans se succèdent d’athlètes pris sur le vif, en des endroits différents. Par l’accumulation d’images, Vertov cherche à rejoindre les modèles antiques de la statuaire grecque et à représenter l’Athlète. Il procède ainsi en quelque sorte par induction : d’un exemple particulier, qu’il multiplie, il en vient à une considération générale. Il dit ainsi, à propos de son film : « moi, ciné-œil, je crée un homme beaucoup plus parfait que celui qu’à créé Adam, je crée des milliers d’hommes différents d’après différents dessins et schémas préalables ».
Le moment du
tournage est désigné (en particulier par cette présence de l’Homme à la caméra,
qui choisit et désigne ce qu’il filme) mais le montage est lui aussi signifié
(images de la monteuse, du film prêt à être découpé, de photogrammes). C’est en
cela que le film est un manifeste (un film « théorique ») pour le
théoricien du montage qu’est Vertov (et qui n’a, au contraire, que rarement
abordé la question du cadrage). L’homme qui filme et se couche sur les rails, celui qui est à proprement parler « l'homme à la caméra », n’est donc pas le
réalisateur présent dans le film : Vertov est présent avant tout dans le montage qu’il
crée.
Vertov, figure
majeure des recherches des cinéastes soviétiques sur le montage, tout en
restant ancré dans le montage discursif soviétique (et dans le montage
intellectuel eisensteinien), flirte avec le montage par correspondances : il met en avant les discontinuités de ses images, et les
rassemble non pas par des liens narratifs, ni même seulement discursifs, mais aussi par des échos qui se tissent entre
ces images.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire