mardi 29 avril 2014

Le Mépris (J.- L. Godard, 1963)




Très grand film de Jean-Luc Godard : il s'agit d'un film quasi-expérimental (dans le sens godardien : être en perpétuelle recherche) et qui reste regardable par le commun des spectateurs (c'est déjà, en cela, une belle réussite de Godard).
Godard cherche – et parvient – à fixer des instants précis de la vie d'un couple (un regard, un geste) et ce que cet instant introduit de doute, de méprise et, finalement, tout l'art de Godard est là, il montre comme cet instant de doute parvient jusqu'à l'incompréhension et, donc, au mépris. Il filme un petit quelque chose qui fait basculer et désordonne la vie du couple. Le génie de Godard, ici, est de parvenir à saisir ces moments qui semblent minimes mais sont les clefs du couple.
L'intelligence du scénario tient dans le couple lui-même : Paul (Michel Piccoli) qui pense beaucoup, psychologise, hésite à agir, se triture l'esprit et s’oppose à Camille, sa femme (Brigitte Bardot), qui agit ponctuellement, mais par instinct, sans passer par de longues cogitations.

Paul et Camille dans la splendeur de Capri
Camille, d'ailleurs se fie uniquement – et simplement devrait-on dire – aux regards que lui porte (ou ne lui porte plus) son mari. De là elle sait et elle sent, l'amour qu'il lui porte (d'où les célèbres questions de Camille à son mari sur ses fesses).
Le personnage de Fritz Lang – joué par F. Lang lui-même – sert de regard moral sur ce couple. Il permet de regarder le couple d'un point de vue extérieur et de sortir des points de vue, tour à tour proposés, du mari et de la femme.
Godard propose aussi, finalement, un film sur un film (on suit les relations entre un scénariste, un réalisateur et un producteur) avec une mise en abyme subtile puisque le regard de Godard sur le couple est porté à l’écran par Fritz Lang – c'est-à-dire par un réalisateur au sens le plus artistiquement génial du terme.



Le film évoque bien sûr Le Voyage en Italie où les errements d'un couple seront sauvéspar la grâce. Et l’ouverture célèbre avec Bardot, fesses nues, sera reprise bien souvent. Par exemple Kubrick, dans Eyes Wide Shut, prend le même point de départ : les fesses nues de N. Kidman et le doute, qui s'immisce dans un couple.

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