Le
long film de Christopher Nolan est à demi-réussi (ou à demi-raté, c’est selon) et Interstellar vient confirmer à la fois
les qualités et les défauts du réalisateur.
La
première partie, toute en action et en interrogation, est la plus réussie. Nolan
est à l’aise, le vaisseau décolle et s’en va explorer l’inconnu. La séquence
sur la planète océan Miller est très réussie. Mais on sait Nolan à l’aise avec
l’action pure, il le confirme ici.
En revanche quelques
scènes sont navrantes en fin de film : on est désolé de voir un
réalisateur si coté être contraint de faire quelques scènes imposées par les
producteurs. La fin est hollywoodienne dans le sens navrant du terme. Mais là
n’est pas le plus gênant dans le film.
En
effet c’est dans la dernière partie que Nolan montre ses limites. A partir du
moment où Cooper entre dans le trou noir, Nolan se perd. Certes son trou noir
est très visuel, mais ce qui s’y passe n’est qu’un scénario qui cherche à retomber tant
bien que mal sur ses pieds. Et on sent que les scénaristes ont tiré sur la
corde pour que l’ensemble reste vaguement plausible. Nolan s’écarte du film d’action et a des visées bien
plus hautes. On sent la tentation kubrickienne et c’est là que le bât blesse :
Nolan est un bon réalisateur mais ce n’est pas un faiseur d’images. Inception, déjà, titillait par son
scénario mais pas par l’image (il y avait la place, pourtant dans ce jeu entre
rêve et réalité). Ici aussi Nolan laisse seul le scénario s’exprimer et
s’emberlificoter. On sent Nolan influencé par Kubrick (c’était déjà le cas dans
Inception), mais cela se résume à
quelques clins d’œil et il ne parvient pas à élever son film vers
une vraie réflexion. Et c’est principalement parce que Nolan ne parvient pas à
utiliser autre chose que son scénario. En effet c’est par l’image que Kubrick
suggère, trouble, interpelle. Qu’on se souvienne de la dernière partie de 2001 (film évidemment matrice de Interstellar), « Jupiter ou les
confins de l’infini » qui est uniquement visuelle : ce n’est pas le
scénario qui questionne, c’est l’image elle-même. Kubrick parvient à montrer ce qui
s’exprime difficilement dans le scénario, c’est bien là la clef de plusieurs de
ses films et sur laquelle échoue Nolan. On pense aussi à Solaris, où Tarkovski, à l'opposé de toute action, utilise le trouble des images pour explorer les méandres de son histoire. Nolan aime les histoires complexes ou
étonnantes (qu’on se souvienne de Memento)
mais il les raconte simplement et il peine à « mettre en images » autre chose qu'une narration.
Nolan
devrait se cantonner à la narration pure des films d’action, là où il est très
bon (sa série de Batman est très réussie). Mais il n’a pas le quelque chose en
plus qui en fait un grand
créateur d’images.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire