Très grand film
de Chaplin, son premier qui soit réellement parlant. On sait que Les Temps modernes est, au sens strict, parlant, mais ce n’est qu’ici
qu’il fait parler son personnage principal (Charlot ne fait que chanter, en grommelot,
dans Les Temps modernes). Cette prise
de parole est importante : elle participe du renoncement à son personnage de Charlot (dont le barbier a bien des
réminiscences, d’autant plus tant qu’il parle peu) et elle permet un
discours final célèbre.
Chaplin,
superstar, s’élève donc, en pleine guerre, contre Hitler et son régime
épouvantable. Il se permet de dénoncer les injustices et les crimes nazis en
faisant rire (le barbier dans son ghetto), caricature à tout va Hitler en
particulier, dans un flamboyant discours (proche du grommelot là encore) dont
la portée, à la fois comique et terriblement inquiétante, fait mouche.
André Bazin a
très bien expliqué comment l’argument du film (la confusion entre le barbier et
Hynkel) tient à la moustache de Chaplin qui lui permet d’interpréter à la fois
la victime et le bourreau. Sans cette moustache, célèbre dans le monde entier
et symbole de l’immense force comique de Chaplin, jamais celui-ci n’aurait pu, de
cette façon à la fois si évidente et efficace, caricaturer Hitler.
On regrettera quelques
fautes de rythme qui ralentissent la narration et le message du discours final,
à la fois très politique et engagé. Il faut toute la conscience du moment de ce
discours (on est en 1940) pour occulter sa lourdeur et son moralisme. On est là
bien loin de la légèreté géniale et intemporelle du mime.
On notera que,
dans To Be or Not to Be, Lubitsch ne
se gêne pas non plus et, lui aussi en pleine guerre, met en scène Hitler et son sosie,
et joue avec génie autour de cette confusion.
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