Magnifique film
de Martin Scorsese (qui n’aime pourtant guère la boxe !) : celui-ci s’appuie sur
l’histoire du boxeur de Jake LaMotta pour brosser le portrait d’une rédemption.
La virtuosité de
Scorsese est manifeste, depuis ses choix esthétiques (le noir et blanc
notamment), ses choix narratifs avec des ellipses, des cuts brusques qui
emmènent au cœur des combats, des répétitions (les disputes conjugales
articulées autour des soupçons de Jake) ou encore des jeux d’images dont il est
coutumier (depuis le ralenti du
générique jusqu’aux combats filmés in
situ, en passant par le plan-séquence emmenant LaMotta des vestiaires au
ring, lors de son match contre Marcel Cerdan).
La maîtrise de l’image, du
rythme, de la musique ou des transitions entre séquences est parfaite. La
violence, intrinsèque à tant de films de Scorsese, trouve ici, dans les coups de
poing infligés ou dans l’impulsivité destructrice du héros, une nouvelle
expression.
La qualité de
l’interprétation fascine. Le jeu de Robert De Niro est resté célèbre : il n'a pas hésité à prendre quelques trente kilos pour interpréter un Jake LaMotta
vieillissant. Interprétations impeccables, également, de la part de ses
compères Joe Pesci (quasi débutant ici) ou encore Frank Vincent, qu’il
retrouvera, toujours avec Scorsese aux commandes, dans Les Affranchis ou Casino.
Jake La Motta reste longtemps persuadé que tout se règle à coups de poing, sur le ring et
que seuls ses combats comptent. Cet enfermement le condamne et le sort du monde
dans lequel il vit, affrontant tous ses proches. C’est ainsi qu’il détruit sciemment
le visage d’un adversaire, à propos duquel sa femme avait eu le malheur de dire
qu’il était beau gosse, ou bien qu’il se laisse détruire à son tour par Sugar Ray
Robinson, ne cherchant plus à esquiver les coups. Ce rapport au corps
(l’obsession du poids, la violence des coups qui marquent) est une thématique
passionnante qui traverse le film.
Ce n’est
qu’après avoir rangé les gants et après avoir tout perdu (sa femme, son club),
une fois qu’il est en prison, que Jake LaMotta voit combien il est vain de
cogner à tout va : il comprend ce qu’il a perdu et, ensuite, il prend
conscience de ce qu’il est et il s’apaise. C’est dans cette autre vie, loin
des rings, loin du succès, loin des coups de poing, le corps avachi, qu’il peut
recommencer à vivre, lentement, sans être en guerre sans cesse contre le monde
entier.
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