jeudi 1 octobre 2015

La Fureur de vivre (Rebel Without A Cause de N. Ray, 1955)



La Fureur de vivre Nicholas Ray Poster Affiche

Un des films américains les plus connus, les plus aimés, dont les images circulent sans cesse. Le film sort un mois après la mort de James Dean qui devient immédiatement un mythe. L'impact du film est immense, la jeunesse américaine s'identifie complètement au personnage tourmenté interprété par James Dean.
Le succès est immédiat pour ce film dont la toile de fond est la société américaine des années 50. Alors que le niveau de vie s'y améliore (les voitures et l'électroménager se développent, les familles présentées dans le film vivent dans des pavillons de banlieues confortables...), le problème de la délinquance juvénile émerge : des bandes de jeunes font leur apparition, des actes de vandalisme et de violence se produisent. N. Ray a déjà beaucoup parlé de ce problème (dans Les Amants de la nuit ou Les Ruelles du malheur). Le film se veut une illustration de cette contestation des valeurs traditionnelles que connaîtront les années 60 (avec l'apparition de la contre-culture américaine).

Le film est présenté comme une tragédie, qui progresse vers un dénouement fatal (la mort sacrificielle de l’un des personnages) : selon la règle des trois unités, l'action se déroule en une journée, au même endroit ou presque (dans la même ville, avec des lieux récurrents - le planétarium, le manoir abandonné -) et l'action est centrée sur une seule intrigue. L'histoire est construite en triangle autour des personnages principaux. Ces trois personnages - Jim, Judy et Platon - sont présents dès la première séquence dans le commissariat, ils se croisent, restent isolés les uns des autres par des parois de verre, ne communiquent pas encore. Ils sont tous les trois dans une relation difficile avec leur père.

Jim trouve son père trop faible (« tu es une poule mouillée », lui dit son fils). Le père de Judy condamne sa fille qui s'épanouit et devient une femme (il l'estime provocante) et, tout à la fois, rejette la tendresse de sa fille à son égard (qu’il juge enfantine). Ce paradoxe maintient Judy dans une situation perturbante : est-elle une enfant ou une adulte ? Platon souffre lui de la démission et de l’absence de ses parents et tout particulièrement de son père. Il cherche une famille de remplacement et croit la trouver auprès de Jim et de Judy. Ce sont donc trois aspects des bouleversements de l’adolescence qui sont abordés.

L'histoire propose la résolution de ce problème posé aux trois adolescents : comment devenir adulte en 24h ? Avec, en filigrane, la question du rapport au père pour se construire. Pour cela, Jim doit traverser une série d'épreuves, de rites initiatiques (un combat au couteau, la course « chiken run »). Ce faisant, Jim résout les problèmes des trois adolescents : il affronte Buzz (qui est le chef et symbolise la force et la domination, tout ce que n’est pas son père) et n’est donc pas une poule mouillée comme lui, il séduit Judy et sait être tendre avec elle, comme un homme ; enfin, il fait office de père de substitution pour Platon. Jim se construit donc comme adulte en répondant au manque d’affection de ses deux amis.
Les épreuves qu'affronte Jim sont des scènes cultes du cinéma : le combat au couteau et surtout la course en autos (la « chiken run »). Le personnage de Jim est une des images les plus célèbres du cinéma américain.

On peut pourtant contester la finesse de l’analyse de N. Ray. Douglas Sirk, dans Tout ce que le ciel permet, suggère au contraire que ce n’est guère la jeunesse qui fera bouger la société. Et, en introduisant des références nettes à Thoreau, de dernier s'appuie avec beaucoup d’acuité sur les références philosophiques qui seront celles de la contre-culture.

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