Très grand film
de Mizoguchi qui, à partir du destin de deux frères, montre comment la guerre
apporte son lot de malheur. La guerre est une toile de fond sur laquelle
Mizoguchi peint les malheurs nés de l’ambition.
Les deux frères veulent
profiter de la guerre pour servir leur ambition : devenir riche pour l’un
(et rechercher un idéal féminin), être un samouraï respecté pour l’autre (et
rechercher un idéal masculin). Mais le prix de leur réussite est la mort ou le
malheur de leurs femmes, qui subissent la faute égoïste de leurs maris respectifs.
La femme, souvent
point central du récit chez Mizoguchi, qui n’aspire qu’à un foyer harmonieux, doit
ainsi porter le poids du malheur : son aspiration est centrifuge, elle
veut regrouper son monde à ses côtés. Au contraire les aspirations des maris
sont centripètes, ils veulent partir, aller chercher ce qui fera leur gloire,
oubliant leurs foyer et, ce faisant, s’oubliant eux-mêmes. Leur prise de
conscience tardive ne les sauvera pas du châtiment : les malheurs se seront
abattus sur ces foyers délaissés.
La mise en scène
est une perfection : tout en maitrise, souvent en légère contre-plongée, les
mouvements de caméra englobent les personnages, accélérant et ralentissant
successivement. Certains plans séquences sont éblouissants. Le film montre moins
de sérénité que d’autres chefs-d’œuvre du réalisateur : le calme de certaines
séquences contraste avec la frénésie et la violence de certaines autres.
Plusieurs séquences
introduisent une dimension onirique, depuis la traversée du lac, fantomatique,
jusqu’aux scènes où Genjuro rencontre Wakasa, femme idéale fantasmée. Ces
scènes contrastent avec le réalisme cru de la guerre, lorsque les soldats violent
Ohama ou tuent Miyagi. Ces femmes, héroïnes tragiques typiquement
mizoguchiennes, voient malgré tout et même tardivement le triomphe de leurs
valeurs.
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