dimanche 27 décembre 2015

Taxi Driver (M. Scorsese, 1976)



Taxi Driver Martin Scorsese Robert de Niro Affiche Poster

Film phare du cinéma américain des années 70, il lance Scorsese aux yeux du monde.
C’est un bon exemple de cinéma moderne vu par le Nouvel Hollywood : Travis Bickle (Robert De Niro, une fois de plus dans une composition hallucinée et mémorable) est un personnage errant, qui parcourt la ville au hasard (dépassant largement le prétexte scénaristique du chauffeur de taxi), qui apparaît de plus en plus déterminé, mais toujours sans but véritable, lui-même ne sachant réellement pour quelle cause il s’entraine. A ce héros perdu répondent les rues de New-York, avec les néons, les cinémas glauques, les bas-fonds. Travis Bickle tente bien de se rapprocher de la face présentable de New York en abordant Betsy, mais rien n’y fait. Betsy qui est par ailleurs soutien du politicien Palantine dont le slogan, à la fois réaliste, caricatural et involontairement sarcastique (« We Are The People »), montre à lui seul combien Travis et, à travers lui, le New York qu’il représente, est délaissé par les politiques (il y a là une dimension politique très bien exprimée). Après des hésitations et des ratées, il se mue en sauveur d’une jeune prostituée.
Travis Bickle semble ainsi intérioriser son impuissance globale à régler les problèmes de New York (qui sont du ressort du politique) et cherche à résoudre un problème particulier, qui est adapté à son échelle (sauver Iris la prostituée).
Scorsese réalise son film comme un cauchemar urbain, son personnage hantant la ville et faisant irruption soudainement, comme une menace latente contre le pouvoir (attentat envisagé contre Palatine) ou contre les trafiquants (attaque finale contre le proxénète).
Le traitement de la violence a beaucoup marqué : c'est un déchaînement soudain et très représenté à l'image (impact des balles sur les corps, doigts explosant sous le choc, sang qui jaillit et barbouille les murs, victimes agonisantes...). Ce type d'irruption brusque de la violence dans le récit est devenu progressivement une tarte à la crème du cinéma. Par exemple Drive, film par ailleurs calme et presque  mélancolique, joue avec des apparitions brusques de scènes très violentes (1).
Le portrait de New York (et, ce faisant, de l’Amérique) est très dur. Scorsese s’approche au plus près des rues, comme s’il cherchait à saisir le cœur palpitant de la ville. Et il n’y reste rien des valeurs fondatrices de l’Amérique, qui sont ici balayées ici par ce personnage solitaire et paumé.

Taxi Driver Martin Scorsese Robert de Niro Affiche Poster

Taxi Driver Martin Scorsese Robert de Niro Affiche Poster
La transformation du personnage au cours du film
Comme dans la plupart des films de Scorsese, certaines séquences sont exceptionnelles. Par exemple lorsque Travis raconte la première fois qu'il a vu Betsy : la scène, commentée en voix off (et la voix ralentit avec l’image), est montrée au ralenti et Betsy passe devant Scorsese lui-même. Scorsese, frôlé par Betsy, n’est plus seulement réalisateur, il est spectateur privilégié (privilégié notamment car lui ne la voit pas en ralenti, il est tout près d’elle, dans la scène).

Martin Scorsese, spectateur de Betsy qui passe devant elle

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(1) : Si l'apparition d'une violence extrême et soudaine est aujourd’hui une tarte à la crème scénaristique, il ne faut pas oublier la grande tarte à la crème technique (les films proposant en général l’une, l'autre ou les deux tartes à la crème en même temps) : l'utilisation systématique et à toutes les sauces de ralentis (utilisation dévoyée des innovations esthétiques de S. Peckinpah).

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