samedi 26 mars 2016

Le Château du dragon (Dragonwyck de J. L. Mankiewicz, 1946)




Très bon premier film de Mankiewicz qui met en place bien des éléments qu'on retrouvera dans ses films ultérieurs.
Le réalisateur se plaît à installer une ambiance purement gothique (décor, isolement du château, enfermement des personnages, romantisme de Miranda, Katrine Van Ryn victime sans défense, tempête et tonnerre qui gronde, etc.). Ce traitement gothique du film le rapproche évidemment de Rebecca, en plus de bien d'autres points communs (à tel point que Mankiewicz n'appréciait pas trop le script - trop proche à son avis de celui de Rebecca - et qu'il n'a accepté la réalisation qu'à cause de la défection de E. Lubitsch, malade).

Deux aspects du film annoncent L'Aventure de Mme Muir, le chef-d'oeuvre à venir du réalisateur (Le Château du dragon, sur ces deux aspects, peut être vu comme une première ébauche, qui ne trouve pas encore sa pleine mesure).
D'une part Mankiewicz introduit une touche fantastique dans son film : les descendants de sang du château entendent parfois une épouse maudite chanter et jouer du clavecin. Cette idée est excellente mais son traitement est frustrant, Mankiewicz l'utilise peu et ne la fait guère intervenir dans sa narration.
L'autre pont entre les deux films est évidemment le personnage principal, à chaque fois interprété par Gene Tierney. Miranda est comme une ébauche plus jeune et plus illusionnée de Lucy Muir. Miranda, dans sa volonté d'aller dans le château de son lointain cousin, puis dans son mariage, réalise ses rêves de jeune fille, elle qui a toujours rêvé de château. Mais, comme lui dit sa mère qui la met en garde, « on n’épouse pas un rêve ».

Miranda est alors prisonnière d'un destin commandé par la dynastie Van Ryn. Elle n'est pas chez elle dans ce château, elle y est comme écrasée par quelque chose qui lui échappe, un peu comme dans Rebecca, même si la sensation est moins forte ici que dans le film de Hitchcock (mais ici cette sensation n'est pas le cœur du film). Nicholas Van Ryn apparaît alors pour ce qu'il est : un monstre qui veut perpétuer une dynastie, et qui met tout en œuvre pour parvenir à ses fins. Le personnage de Katrine, sa première femme, pourtant peu montré, est très intéressant : Katrine n'est pas encore vieille, mais elle n'a plus sa jeunesse, elle est déjà éteinte, recroquevillée dans cet immense château, et elle ne peut donner à son mari ce qu'il désire le plus (un enfant mâle), elle se trouve ainsi très vite condamnée.

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