Important western qui présente une évolution
radicale du genre. Il propose en effet de reprendre de nombreux codes des
westerns classiques pour les détourner. Le détournement touche aussi bien les grandes
séquences habituelles (décor de l'action, duels, saloon...) que les idées
morales (fondation d’une communauté, importance de la religion…).
La séquence d'ouverture est un bon exemple de ce détournement opéré par Altman. On le comprend en la comparant avec celle d'un western classique, par exemple L'Homme de l'Ouest d'A. Mann.
Image du générique de L'Homme de l'Ouest de A. Mann |
Chez A. Mann, dans le décor classique du désert
de l'Ouest et dans une musique typique du genre, le héros apparaît, magnifié
par une légère contre-plongée et le personnage est déjà auréolé de la star :
Gary Copper est immédiatement reconnaissable.
Image du générique de John McCabe |
Chez Altman tout est inversé : on
est dans les montagnes, il fait froid et brumeux, il pleut. Le personnage qui
surgit, saisi en légère plongée, est à demi-caché par les broussailles, il est
parfois délaissé hors champ par la caméra au gré du sentier qui bifurque ici et
là. On ne peut reconnaître Warren Beatty qui est emmitouflé. La chanson de Leonard Cohen englobe le tout d'une note de nostalgie et de tristesse (les images
répondant totalement aux paroles qui annoncent la grande trame du film). De
même ensuite dans le saloon, où on voit mal et où on entend mal : le personnage de W.
Beatty n'est toujours pas mis en évidence, il est noyé au milieu des autres
personnages. On est à l'opposé des scènes de saloon conventionnels ou le jeu de
mise en scène centre l'action sur la table du héros. Et c'est ainsi que, tout
au long du film – et jusqu’au duel final – Altman prend le contre-pied des
manières de faire classiques.
Les thèmes aussi sont contournés et permettent à Altman de dire ce qu'il pense de la société américaine : ce n’est plus l'église mais le bordel qui est au centre des préoccupations.
Malheureusement cette manière de faire
d'Altman n'ouvre aucune nouvelle perspective pour le western. Autant le style
de Sergio Leone (qui, lui aussi, reprend les principales séquences classiques pour
les styliser à l'extrême) a donné une nouvelle direction pour des dizaines de
réalisateurs, autant Altman semble, au contraire, fermer et condamner le
genre : l'Ouest semble bien mort, le héros meurt abandonné, tant bien que mal
la communauté se met en place, mais déjà sous la coupe des puissants. L'église
sera sauvée mais pas son curé. L'Amérique qui se constitue sous nos yeux ne
promet guère de lendemains qui chantent nous dit Altman.
John McCabe est ainsi un des westerns importants, qui, avec quelques autres, enterre l'un des plus grands genres du cinéma mondial.
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