Premier film de
David Lynch où son style si particulier se met réellement en place, Blue Velvet est une réussite. Dans ses
films précédents, Lynch avait oscillé entre l’expérimental le plus débridé (Eraserhead) et un plus grand classicisme
(Elephant Man). Encore qu’Elephant Man distille une ambiance et
des fulgurances qui montrent toute la puissance visuelle du réalisateur (la
séquence du cauchemar par exemple).
Mais, ici, l’équilibre
est trouvé entre ces deux pôles (l’excentrique et le classique) tout en mettant
une touche onirique puissante qui le suivra désormais. Cela donne cette humeur particulière
qui signe le film, avec un langage sonore et visuel très stylé, et des
fulgurances qui surgissent par moments.
Sur fond de film
noir, la trame du film est pourtant assez conventionnelle : en suivant
Jeffrey dans une étrange enquête, entouré de deux femmes que tout oppose et
découvrant un psychopathe dégénéré, le film s’apparente à une perte d’innocence
pour Jeffrey qui découvre un monde caché – mais pas si lointain de son monde, propret
et aux couleurs immaculées – maléfique et révélateur, empreint de pulsions et
de violences.
Mais, si l’intrigue
est classique, son traitement est très particulier et Blue Velvet montre combien la manière de mettre en scène est bien
plus qu’une simple façon de raconter le récit et touche à la nature même du
récit (selon le fameux mot d’André Bazin). On retrouve alors des motifs qui
hanteront désormais le cinéma de Lynch : une femme blonde et une femme brune ;
une dimension onirique puissante, construite à partir de jeux d’images, d’une
musique des années 60 et de gros plans étranges et insistants ; un univers
sonore bizarre, traversé de brusquerie et de grouillements ; ou encore des éléments
visuels qui permettent de passer d’un univers à un autre (ici une oreille
coupée, une boîte étrange dans Mulholland Drive).
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