mercredi 7 mars 2018

Quatre étranges cavaliers (Silver Lode de A. Dwan, 1954)




Excellent western d’Allan Dwan, sec et tendu comme un arc, qui trace un portrait peu reluisant de la société. À l’instar du Train sifflera trois fois, il dénonce la lâcheté de la communauté – qui rejette très vite celui qu’elle respectait un moment avant – et la bêtise de masse (reprenant là aussi des thèmes souvent évoqués au cinéma, de Fury à The Chase en passant par The Ox-Bow Incident).
Le film reprend aussi les deux images classiques de la femme (l’épouse fidèle, auprès duquel on fonde un foyer et la prostituée, que côtoie l’aventurier). Ces deux femmes représentent les deux moments de la vie de Dan Ballard (très bon John Payne) : il fut aventurier et le voilà respectable et prêt à s’installer. Elles seules soutiendront Dan, redonnant à la femme une position centrale dans le récit (position qu’elle a en réalité assez souvent dans les westerns).
Mais les deux femmes autour de Dan sont les seules indulgences de Dwan : Dan étant rattrapé par son passé et calomnié au prétexte du flou sur ce passé, McCarthy (Dan Duryea, très bon méchant et second rôle habituel des westerns) et sa bande n’ont besoin que de quelques insinuations venimeuses pour retourner l’opinion. L’homme respectueux devient paria avec une facilité que fustige le réalisateur.



Réalisé en 1954, la charge de Quatre étranges cavaliers sur la société a d’évidents relents contemporains : la dénonciation du Maccarthysme qui sévit est violente (le nom de McCarthy, autant que sa manière de procéder, suffise à orienter le spectateur sans grande ambiguïté).
Formellement le film est exemplaire : à un classicisme traditionnel, organisé autour d’un rythme serré et d’un découpage sec qui construisent un récit âpre, Dwan compose des plans séquences éblouissants, lorsque Dan est poursuivi à travers la ville (avec de célèbres et merveilleux travellings). L’opposition entre la ville en fête qui s’apprête à célébrer le 4 juillet et la solitude de Dan traqué est remarquable. De même que la séquence initiale, construite, déjà, sur cette opposition entre l’ambiance de fête et le groupe de cavaliers que l’on sait déjà malfaisant. Avec peu de paroles des personnages bien plantés, des jeux de caméra virtuoses, Dwan maîtrise son western de bout en bout.
Et il se permet une ironie finale puisque c’est dans l’église, cœur traditionnel de la communauté dans le western, que se retrouvent Dan et McCarthy et, même, c’est le ricochet d’une balle contre une cloche qui sauvera Dan…

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