Très bon film de Alfred E. Green, assez typique de cette singulière période
hollywoodienne du pré-code – juste après l’avènement du parlant et avant que le
code de censure ne soit appliqué – où les réalisateurs et les scénaristes
abordent mille et un sujets frontalement et sans retenue, ce qu’ils ne
pourront plus faire quelques années plus tard.
Ici une femme sans scrupule (très bonne Barbara Stanwyck) use de ses
charmes pour grimper un à un les échelons sociaux et parvenir à ses fins. C’est
ainsi que, de l’employé de chemin de fer jusqu’au big boss quinquagénaire en passant
par le directeur de section trentenaire, Lily séduit, profite et avance. Bien
entendu elle fait fi de toute morale, et son cynisme n’a d’égal que son absence
totale de remords, quand elle abandonne un amant pour un autre, placé plus haut
dans la hiérarchie. Bien entendu, l’image du self-man chère à l’Amérique en
prend pour son grade.
Indifférente aux ravages qu’elle peut provoquer, ce n’est qu’en toute
fin de film que Lily est rattrapée par la naissance de sentiments. Ce happy-end
montre que c’est le film lui-même qui est rattrapé, in extremis et tant que
faire se peut, par la censure qui s’installe. Mais à mettre en scène cette
femme de petite vertu sans morale, on comprend aujourd’hui combien ce film a pu
choquer les ligues de vertus conservatrices et précipiter l’application du code
Hays.
Le film, en plus d’un rythme efficace, profite de touches d’humour pleines
d’ironie comme la référence à Nietzsche ou les plans verticaux qui suivent, le
long de la façade de la compagnie, la progression fulgurante de Lily étage après
étage.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire