lundi 6 octobre 2025

Le Témoin (Il testimone de P. Germi, 1946)

 



Si Pietro Germi, dès ce premier film, s’appuie sur un fort accent néoréaliste (le regard sur l’Italie de l’après-guerre ne cache pas la pauvreté, les difficultés, les arrangements), ce n’est qu’un arrière-plan pour ce qui constitue en réalité le cœur du film : le parcours de Pietro, filmé d’abord comme un condamné qu’une combine de son avocat va tirer d’affaire et filmé ensuite, en fin de film, comme suivant un chemin de rédemption, avec une humeur chrétienne très forte.
Alors que Pietro était tout à fait tiré d’affaire et que, même, le vieil homme qui tenait la preuve de sa culpabilité en était venu à mourir, le voilà assailli par la culpabilité. Alors qu’il avait relancé sa vie en tournant la page loin de toute criminalité, la rencontre avec ce témoin n'avait pas fait naître la peur du châtiment – châtiment qu’il avait entrevu terriblement plus tôt dans le film –, mais bien la culpabilité. Alors qu’il est tout à fait blanchi, le voilà incapable de faire un pas de plus en avant, malgré la sincérité de ses sentiments pour Linda.
Cette dimension supplémentaire donnée à Pietro illustre combien Germi saura, tout au long de ses films – et en particulier dans ses drames – scruter au plus près ses personnages, chercher à les comprendre sans jamais les réduire pour rester proche d’eux.


jeudi 2 octobre 2025

Le Miroir à deux faces (A. Cayatte, 1958)

 



Intéressant drame d’André Cayatte, qui joue très bien avec deux acteurs qu’il utilise, de façon étonnante, complètement à contre-emploi.
En effet le film s’appuie sur Bourvil qui campe un mari d’abord mesquin puis de plus en plus insupportable. Il est vrai que l’acteur sortait des Misérables où il tenait le rôle de Thénardier, néanmoins cela reste, pour Bourvil, un rôle loin des benêts naïfs et comiques qui constitueront une part importante de sa filmographie et qui feront son immense renommée. Rien de tout cela ici, dans ce rôle où il commence avec de la bassesse et des mensonges pour finir en étant tout à fait détestable.
Face à lui, Michèle Morgan est enlaidie une large partie du film et le scénario joue beaucoup de cette absence de beauté. 
Le film reprend un peu l’idée, en moins extrême, des Passagers de la nuit où Bogart reste le visage couvert de bandages la moitié du film. Ici on voit l’actrice, mais elle est méconnaissable. Ce n’est qu’en fin de film que Michèle Morgan retrouve son beau visage. Une grande partie du film tourne autour de cette transformation chirurgicale du personnage et de la réaction – emplie d’abord d’amertume et ensuite tout à fait haineuse – du mari (qui se voit pourtant avec une femme beaucoup plus jolie au bras).
Cette utilisation des acteurs est une véritable curiosité et il faut dire qu’avec des acteurs inconnus le film n’aurait pas, aujourd’hui, le même impact.