Très intéressant et intrigant film d'Alfred Hitchcock, L'Ombre d'un doute allie le
jeu complexe entre deux personnages avec une intrigue qui sème le doute tout au
long du film dans l'esprit du spectateur. Avec sa maîtrise habituelle, le
réalisateur construit pas à pas son récit, introduisant un malaise dans cette
petite famille bien comme il faut de cette petite ville californienne bien sous
tous rapports. Ce malaise – incarné par cet oncle Charlie (très bon Joseph
Cotten, qui construit un personnage qui, sans être totalement antipathique,
rend impossible son identification par le spectateur) – est d'autant plus insidieux
que la relation est d'abord fusionnelle entre la petite Charlie et son tonton
fraichement débarqué. Et c'est toute la sève du film que de voir comment cette
connexion entre les deux va être progressivement balayée, à coup de doutes, de
petits détails intrigants, que repère le spectateur ou la jeune Charlie. Et
quand le doute laisse place à la certitude c'est alors que le policier arrive
dans le récit.
On n'est pas loin du récit d'initiation : pour la jeune Charlie c'est
la fin d'une relation fusionnelle d'enfance avec son oncle et, bien plus
encore, c'est la découverte du mal. Un mal qui rôde, impalpable mais ressenti,
un mal qui vient jusque chez soi, au creux de sa maison.
Pour Hitchcock, la page anglaise semble tout à fait tournée : on ne
trouve plus trace, désormais, de la moindre teinte anglaise dans le film. Et,
s'il n'atteint pas le niveau de ses plus grands chefs-d’œuvre, L'Ombre d'un
doute reste un film brillant et très typique de la maîtrise d'Hitchcock et de
son style, axé sur un travail au corps du spectateur, qui est tranquillement
mené par le bout du nez tout au long du récit.
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