samedi 9 mars 2013

Jeux interdits (R. Clément, 1952)




Très beau film de René Clément, à la fois juste et touchant. Clément peint une tranche de la vie de la France, qui vit comme elle peut alors que les bombes pleuvent aux alentours, mais aux travers des yeux d'un enfant frappé de plein fouet par la guerre.
Le film démarre avec une séquence très réaliste (dans la lignée de La Bataille du rail) et très tragique, séquence qui permet au réalisateur d'extraire Paulette de la foule des réfugiés. À cette séquence répond la séquence finale où Paulette, inversement, alors que la caméra était fixée, replonge dans la foule des anonymes. Jeux interdits, alors, consiste en un plan rapproché sur Paulette, à travers laquelle les horreurs de la guerre sont vécues.
Le monde paysan y prend pour son grade, même si le regard est plus drôle (la bagarre dans le cimetière) que critique. On peut noter la différence de traitement quand on compare avec des drames paysans classiques (par exemple La Ferme du pendu, au ton beaucoup plus dur et dramatique). Ici Clément, on le sent, a presque un regard attendri sur le monde paysan.
Le film, de façon très poétique, montre comment les enfants circonscrivent leur obsession morbide dans leur petit cimetière, qui est une expression à l'image de cette omniprésence de la mort. Cimetière merveilleux (et interdit avec toutes ses croix volées !) que ne verra jamais achevé la petite Paulette. L’horreur de la guerre, avec ses drames et ses séparations, filmée à hauteur d’enfants, n’en apparaît que plus tragique encore.
René Clément parvient à équilibrer avec une justesse merveilleuse de multiples tons, passant du tragique à la comédie, de la dureté à la douceur, de l'ironie à la tendresse. La fin est très belle et très triste, avec le cri déchirant de Paulette appelant Michel (comment résister à ce cri ?). Brigitte Fossey est exceptionnelle tout au long du film, en incarnant avec une incroyable justesse cette petite orpheline qui se raccroche à ce qu’elle peut.


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