lundi 3 juin 2013

A bout de souffle (J.- L. Godard, 1960)




Très célèbre premier film de Jean-Luc Godard, qui vient donner un coup de jeune au cinéma en réinventant constamment le rythme, le montage et la liberté de narration.
Tournant le dos au studio et aux producteurs, Godard sort dans la rue avec sa caméra, tourne sans décor ni lumière, et choisit de diriger très peu ses acteurs – Jean-Paul Belmondo et Jean Sieberg –, qui deviennent aussitôt des icônes de ce souffle de liberté.



La principale innovation est dans le montage qui permet un rythme et une narration débridée : Godard, tout en inventivité, utilise à l’ancienne des fermetures à l’iris, met des adresses face caméra, laisse ses personnages errer dans le cadre et multiplie les faux-raccords, les ruptures ou les enchaînements étranges (en début de film le montage fait correspondre, par ses coupures successives, l'image l'univers sonore, par exemple lorsque Belmondo chantonne « Pa-tri-cia » en changeant de plan à chaque syllabe).


Au-delà de son style, le film est aussi d’une très grande modernité en ce qu’il met en scène des personnages qui avancent sans trop savoir vers quoi, qui vont et viennent, qui tournent en rond et restent indéterminés. Michel, par ses facéties, son radicalisme (il refusera le compromis et ira jusqu’à la mort) et par la décontraction que lui prête Belmondo, marque le film de son empreinte.
On remarquera, cependant, que si le film donne un coup de fouet au cinéma, il propose une intrigue on ne peut plus lâche, vaguement construite à partir d’un scénario de film noir. Et le film a beau multiplier les citations et les références, il y a, de ce point de vue, un appauvrissement. Il ne reste du film noir que ce destin qui entraîne Michel vers la mort. Mort dont il se fiche un peu, pour tout  dire (il est fatigué et veut dormir), mort qui vaut mieux, dit-il, que le compromis.

On notera alors que, si le film, avec quelques autres, lance la Nouvelle Vague française, cette Nouvelle Vague, si elle est une nouvelle manière de faire des films, n’apporte pas grand-chose du point de vue des idées et des thèmes. C’est une différence majeure avec le Nouvel Hollywood qui, inspiré par la Nouvelle Vague, rompra lui aussi avec les studios et fera entrer le cinéma américain dans la modernité mais qui en profitera, surtout, pour parler de l’Amérique, celle que les grand studios ne montraient pas.
Rien de tout cela en France où, hormis ce qui a trait à l’industrie du cinéma elle-même et à l’exception de quelques films remarquables (Hiroshima mon amour ou Les 400 coups), la Nouvelle Vague ne se fera guère le miroir de la France puisqu’elle se contentera de mettre en scène, en boucle, les discussions germanopratines de jeunes bourgeois qui ne s’assument pas.

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