Très grand succès de la Fantasy, Le Seigneur des anneaux est
une adaptation très hollywoodienne des romans de Tolkien. Peter Jackson s’approprie avec un plaisir évident l’univers
et les personnages de l’histoire dans un ensemble qui se présente en un triptyque de plus de 9h (environ 3h par épisode). C’est d’ailleurs un point important des
films : Jackson aime les Hobbits autant que Tolkien, et il respecte infiniment
ces petites créatures.
Le point fort de ces films est
d’avoir réussi à définir un scénario de cinéma à partir des romans de Tolkien,
en parvenant à garder une bonne cohérence narrative, en se centrant sur quelques
évènements principaux et en parvenant, bon an mal an, à faire progresser le ton
vers un aspect plus tragique et noir au fur et à mesure des trois films.
Visuellement l’emploi de maquettes,
de maquillages divers et d’un large recours au numérique ont permis de créer un
monde graphique très réussi.
Le film rencontre principalement
deux problèmes, qui sont des habitudes malheureuses des blockbusters.
Le premier est un évident problème
de rythme. Le réalisateur, sur des formats de plus de deux heures trente, a bien du
mal à ne pas se perdre. Si certaines séquences sont bien emmenées et sont
réussies (le passage dans la Moria par exemple, ou l’attaque du gouffre de Helm), d’autres sont très lourdes, très lentes, complètement excessives (les pleurs
du groupe à la mort de Gendalf, à grands coups de ralentis, ou les multiples fins du
Retour du roi).
De même Jackson a bien du mal à
tenir ses récits parallèles : dans les épisodes 2 et 3 (Les Deux tours et Le Retour du roi), il alterne des moments qui sont épiques et rythmés avec la
progression de Frodon, lente et centrée sur la psychologie du personnage.
Cette narration diversifiée devrait
enrichir le récit sans provoquer de telles coupures de rythme. Le gap entre ces deux narrations est amplifié parce que les deux personnages les plus complexes psychologiquement (Frodon et Gollum) se
côtoient et laissent des miettes aux autres qui sont tous de
simples personnages inamovibles de film d’aventures, sans grande épaisseur.
Dès lors on appréciera telle séquence ou on s’agacera de tel personnage : on trouvera bien amenée la « résurrection » de Gendalf mais on trouvera facile l’aide décisive apportée par l’Armée des Morts (le scénario du film allant un peu vite en besogne) ; on appréciera les hordes d'orques épouvantables qui assaillent la cité mais on sera frustré d'une bataille brutalement interrompue pour aller suivre Frodon arpenter lentement le Mordor.
Le second problème est celui du ton des films. C’est
qu’il est bien difficile de faire se côtoyer
des moments qui se veulent franchement drôles (plusieurs hobbits ont uniquement
un rôle de clown, de même l’humour potache du nain Gimli) et d’autres beaucoup
plus tragiques et sérieux (la traque des Nazgûls, les pleurs à la mort de Gandalf). Mais
c’est là un aspect incontournable et navrant des blockbusters : l’humour se veut nécessaire,
quitte à sacrifier des personnages. Et l'alliance de ces deux tons est ratée : difficile de concilier la noirceur tragique de Saroumane (ou de Soron) avec les petites blagues qui fusent ici et là.
Cela dit, Peter Jackson livre
une série de films visuellement tout à fait conventionnels et sans brio. Comme dans tant d’autres
blockbusters, il accumule les vues classiques en caméra rapide et qui plongent
en survolant l’action. On a droit, comme il se doit, aux habituels
ralentis qui polluent maintenant systématiquement tant de films, montrant par
là combien Jackson se plie aux modes cinématographiques d’Hollywood. Il n’y a
pas de travail de mise en scène particulière, pas de lumière ou de sons qui sortent
de l’ordinaire, pas de pattes ou de style particulier propre à Jackson. Son
talent est d’avoir converti en films hollywoodiens les trois romans.
Simplement Jackson a le sens des
scènes épiques qu’il filme avec plaisir, et ce sont les moments les plus réussis.
On sent bien, dès qu’il s’agit d’aller toucher le cœur des personnages, que la
caméra lisse et froide ne permet guère de s’approcher : il y a bien peu d’émotion
dans ces films. Les personnages ressentent des émotions, mais le spectateur
bien peu. Les personnages pleurent Gendalf, alors que le spectateur, qui
pourtant l’aimait bien, n’a pas les larmes aux yeux ; il se dit « Ah zut ! C’était mon préféré, il va falloir faire sans maintenant » et c’est à peu
près tout.
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