Chef-d’œuvre du film noir, La Griffe du passé en constitue sans
doute un des plus grands sommets, au côté de trois ou quatre autre films (de
Wilder, Preminger ou Aldrich).
Parfait film noir, on retrouve,
magnifiés, tous les ingrédients typiques du genre : un héros qui subit
l’action, avec un fatalisme conscient qui renforce l’impression d’étouffement
et de tragique, une femme fatale, un univers de corruption et de dépravation,
une machination qui échappe au héros, quand bien même il sent qu’il est pris
dans un piège.
L’atmosphère étouffe peu à peu Jeff,
qui sait bien qu’il ne peut échapper à son passé, tourner la page et commencer
réellement une autre vie. Et s’il a pleinement conscience du piège qui lui est
tendu, il ne cherche pas à y échapper, sentant, confusément, irrépressiblement,
la fin tragique.
Comme toujours, Tourneur reste très
sobre, son noir et blanc envahit l’image, il distille une atmosphère plus qu’il
ne montre franchement les choses. Et, malgré cette tension pesant sur les épaules de Jeff,
malgré les rires inquiétants de Whit Stelring (Kirk Douglas), malgré cette
sensation d’inéluctabilité sinistre, il ressort de ce film une pureté directe et
parfaite.
L’interprétation
est hors de pair : le flegme naturel de Robert Mitchum est au cœur du fatalisme
qui imprègne le film. Son jeu laconique s’oppose parfaitement à celui, beaucoup
plus expressionniste, de Kirk Douglas, terriblement inquiétant derrière son
apparente jovialité. Et Jane Greer est une femme fatale parfaite, extraordinaire
incarnation de ce personnage type – et légendaire – du cinéma hollywoodien.
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