Premier film fondateur de John Ford, qui met en
place des personnages et des séquences qui s’installent dans le western comme
autant de classiques.
Les personnages seront des archétypes (le hors-la-loi, la
prostituée, le joueur professionnel tricheur, le banquier, le médecin) qui
seront mille fois repris à partir de ces bases. Bien plus que leur simple
dénomination, c’est le caractère associé à chacun qui est figé pour
longtemps : c’est ainsi que le médecin est alcoolique, que la prostituée
est aussi une femme au grand cœur (elle se soucie de la femme enceinte) alors que, tout au contraire, le banquier est
indifférent au monde, il se contente de s’accrocher à sa sacoche si précieuse. Ford utilise le principe classique d'enfermer tout son petit monde dans un endroit clos (et même très petit : une diligence) et de laisser se tisser les relations et les tensions.
De même Ford fait entrer dans la légende le
Monument Valley : il filme pour la première fois ce paysage grandiose, devenu une image mondiale et infinie du western. Il présente la Nature
comme un tout englobant, dans lequel évoluent les personnages mais qu’ils ne
peuvent dépasser. Les images des Indiens apparaissant au sommet de la colline
avant d’attaquer appartiennent aussi à la légende du cinéma. L’attaque, extrêmement
spectaculaire, à coups de chevaux au grand galop, d’Indiens hurlants et de
trompette de cavalerie est exceptionnelle et virtuose. Ford, qui expliquait avec un à-propos
plein d’humour que si les Indiens abattaient les chevaux alors le
film s’arrêtait, prolonge le plaisir en rallongeant la séquence. Les technologies
d’alors offrent peu d’alternatives pour filmer une telle séquence : les
caméras sont embarquées sur des autos qui foncent pour devancer les chevaux. Le
résultat est fabuleux.
Ford manie avec virtuosité l’alternance des
extérieurs et des intérieurs, mais aussi les petites histoires pittoresques si
typiques qui peuplent son œuvre. Il prend le temps de faire vivre sous nos yeux
son petit monde (il fait accoucher la femme de l’officier), d’épaissir la
psychologie de chacun qui dépasse la simple description rapide. Cette
alternance de grands moments épiques avec des scènes intimistes est à la fois
typique du réalisateur et très difficile à manier. Mais pas pour Ford qui jouera toujours avec
facilité de cette alternance.
John Wayne tient là ses galons de star (il avait déjà un premier rôle, mais resté sans suite, dans la très bonne Piste des géants de R. Walsh).
Ford complétera au fur et à mesure de ses films – en particulier avec La Poursuite infernale – cette mise en place du genre, mais on tient là un film majeur qui pose les jalons
du western et définit des séquences classiques et inoubliables. La Chevauchée fantastique marque alors
un regain formidable du genre qui ne se démentira pas pendant 20 ans.
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