samedi 18 février 2017

Elle (P. Verhoeven, 2016)



Bon film de Paul Verhoeven, qui, à partir d’une trame mince mais bien menée, arrive à construire un film réussi qui oscille entre un ton noir et celui, plus détaché, de l’humour  noir grinçant.
Le film avait en effet tout pour être très noir et traumatique, tant il regorge de thèmes violents et agressifs, mais Verhoeven s’appuie sur son personnage principal pour créer une distanciation ironique et grinçante, provoquant un mélange de tons parfait.
Il dispose d’une excellente Isabelle Hupper : Michèle, son personnage, est une femme complexe qui traverse la vie avec fracas. Egoïste, méchante, jalouse, épouvantable avec ses proches, son passé tragique qu’elle veut enfouir n’en finit pas de remonter à la surface. Et l’on suit les mille avatars de sa vie, depuis sa belle-fille épouvantable, sa mère délurée, son père psychopathe, jusqu'au viol répété, à l'accident de voiture, etc.
C’est en outre un bel exemple d’identification propre au cinéma : le spectateur épouse le regard de Michèle, en prenant fait et cause pour elle, alors que, probablement, à bien des égards, il détesterait avoir affaire à un tel personnage dans sa vie de tous les jours.
Verhoeven montre tout son talent : outre des jeux de flash-backs alliant image mentales et souvenirs, il distille dans son film de nombreux signes (qui sont autant de symptômes deleuziens) qui montrent comment Michèle est rattachée à un monde pulsionnel, duquel elle ne peut échapper, et qui lui tourne autour. Ainsi les scènes de viol, la descente dans la chaufferie, la photo d’elle petite en train d’aider son père à brûler sa maison, le jeu vidéo modifié où elle est violée par un monstre.
On retrouve des sensations propres à un cinéma pulsionnel (celui de Crash par exemple, quasiment cité avec le boitement de Michèle après son accident) qui offre comme un double fond infernal à cette histoire d’une femme qui continue de se construire et de traverser la vie avec rage et détachement, alors qu’elle est violée, attaquée, esquintée, matraquée de toute part.

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