Film magnifique
de Manuel de Oliveira, dont les images vibrent et les paroles s’amoncellent. L’accord
– on devrait dire l’harmonique – entre ce qui est vu et ce qui est dit crée une
préciosité lente et délicieuse.
Il s’agit
essentiellement d’un quatuor de personnages, aux liens complexes, mais dont la
complexité est longtemps cachée par les faux-semblants et que de Oliveira ne
révèle que peu à peu. Il faut accepter de se laisser porter et de ne comprendre
qu'au fur et à mesure, et encore tout ne sera pas élucidé des rapports troubles ou des
motivations des personnages.
Camila, centre
pulsionnel du film, irradie l’image et se détache, aussi bien visuellement que
dans ses décisions parfois intéressées (elle épouse Antonio pour la position
sociale qu’il lui permet d’obtenir), parfois fatalistes ou, parfois encore,
détachées du monde (ses visites à la petite chapelle où elle vient chercher
l’appui de Jeanne d’Arc).
Faisant
indirectement référence au principe d’incertitude d’Heisenberg (en particulier
par l’impossibilité de connaître les comportements des femmes – Celsa, Camila
ou Vanessa – et leurs réactions), de
Oliveira joue avec l’image, filme des plans fixes qu’il fait durer, laisse ses
personnages longuement débattre, jouer avec les noms et se faufiler dans la
rhétorique. Il pourfend l’illusion et la manipulation (celles d’Antonio ou
Vanessa) et glorifie la force de vie de Camila.
Le film est
extrêmement riche, on regrette peut-être le choix de réaliser certaines
séquences volontairement en porte-à-faux esthétiques (celles se déroulant dans
la boîte de nuit) : elles sont peut-être trop en rupture avec l’univers fascinant,
chaud et raffiné de l’ensemble.
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